« Telle une chair tatouée », un nouveau recueil de poésie d’Alima Abdhat

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Un bel hommage à la parole est rendu par Alima Abdhat dans « Telle une chair tatouée », son nouveau recueil de poésie, dans lequel le pouvoir des mots intonés et investis dans une belle chimie des sémantiques, restituent les souvenirs d’une vie dans son ultime instant qui finit, dans un élan de résilience, par tourner le dos à la fatalité.

Paru aux éditions « ANEP », ce nouveau-né dans le rayonnage des grandes poésies, déployé en 88 pages et préfacé par le journaliste-écrivain Arezki Metref, rassemble 70 textes répartis en cinq thématiques aux contenus muris, où Alima Abdhat se résout à partir à la recherche de la vie aux frontières même de la mort.

Quel bon condensé de toute une existence qu’est ce moment fatidique qui précèderait le grand voyage et où le film de toute une vie est déroulé aux yeux d’un être en péril qui reverrait ainsi, son temps antérieur, dans ses joies et ses peines, se comprimer et défiler dans sa mémoire, pour le voir ensuite, revenir miraculeusement parmi les siens.

Esthéticienne du sens, Alima Abdhat a fait de cette intense expérience son champ d’inspiration, se dotant ainsi d’un corpus aux contours existentiels jusque-là inexploré, propice au regard kaléidoscopique de sa créativité prolifique qui revient ainsi, commettre une nouvelle fois un recueil d’une dimension essentiellement philosophique et métaphysique.

Dans la « polyphonie des mots » aux atmosphères solennelles, « Telle une chair tatouée » met subtilement le lecteur en rapport avec l’espace, la méditation, la mémoire, la relation et la quintessence, cinq thématiques, déclinées chacune en une série de poèmes hautement lyriques.

« Les souvenirs ne surgissent pas d’un passé extérieur, ils sont en nous comme des gravures indélébiles taillées dans la chair », explique Alima Abdhat qui évoque, entre autres sujets se rapportant aux « lieux », trois cités « érigées en personnages » qui l’ont fortement marquée: Batna sa ville d’origine, Alger qui l’a adoptée et Ghaza, ville martyre représentant pour elle une « blessure ouverte ».

Telle une plasticienne des mots, la poétesse dénonce densément dans « L’oiseau du Soleil », la situation à Ghaza où le peuple palestinien vit au rythme des interdictions, des persécutions et actuellement des génocides et des crimes de guerre sauvagement perpétrés par l’armée d’occupation sioniste.

Des tranches de vie imprimées dans l’inconscient de l’un et le miroir de l’autre, des expériences communes, des réflexions personnelles ou celles d’écrivains, ou de philosophes ayant dépeint l’existence dans ses tribulations et ses errances sont abordées dans « Mer méditations … », à l’image de la pièce « Syllogisme » dans le même chapitre, qui traite en prose de la problématique de l’amour, concluant que le manque de communicabilité pourrait tuer deux êtres qui s’aiment, mais pas l’amour qui lui, ne meurt jamais.

Du concept philosophique platonien, à la « respiration » de l’amour dans la réalité du quotidien, la relation dans le couple est scrutée dans « Elle et lui », où différentes situations intervenant dans une vie à deux sont restituées à travers des mots qui essayent de se frayer un chemin dans les méandres de la pensée émancipée.

Tandis que le chapitre, « Murmures de mémoire » se dresse telle une stèle à l’effigie des personnes disparues qui se voient ainsi convoquées le temps d’une déclamation pour rappeler leur présence et leur souvenir, « Ecumes de plumes » porte les interrogations de la poétesse sur, entre autre, « la raison qui la pousse à l’écriture » (celle poétique notamment), affrontant les difficultés de ce « moment de solitude » qui, bien souvent, n’arrive pas à rendre les préoccupations de l’auteur, à l’image d’un maestro qui enchaîne les répétitions avec ses musiciens, pour leur faire jouer ce qu’il n’y a pas d’écrit dans ses partitions.

Dans un élan lyrique invitant à la méditation, la poétesse dédie ses vers à des émotions intenses qu’elle déploie, à travers des fragments d’histoires et des souvenirs lointains, laissés en suspens à la disposition du lecteur qui se les appropries, pour prolonger leurs genèses en y projetant son propre vécu.

Une œuvre plastique aux traits abstraits caractérise le choix iconographique du recueil d’Alima Abdhat, qui accueille le lecteur avec une couverture frappée d’une toile qu’Arezki Metref, également poète des formes et des couleurs, a brillamment signée, un dessin aux formes et aux écrits entremêlés dans une variété de couleurs nuancée qui renverraient aux troubles de l’instant ultime d’une vie, dans ses souvenirs lancinants.

Enseignante à l’Université d’Alger, Alima Abdhat a déjà publié, « Colères, qu’êtes-vous devenues ? » (2019) et « Puisque tu es la mer » (2021).

APS

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