Les archives algériennes ouvertes en 2019: Le lourd héritage du colonialisme

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La résolution de l’épineuse question de mémoire de la guerre d’Algérie repose essentiellement sur les archives franco-algériennes de ce conflit.

C’est ce qu’explique Sylvie Thénault, directrice de recherche au CNRS dans une tribune publiée le 14 octobre sur le site The Conversation. «Plus d’un demi-siècle après l’indépendance de l’Algérie, la question des archives reste une question majeure du contentieux historique entre l’Algérie et la France», a écrit l’historienne. «Elle s’annonce comme une tâche primordiale pour Emmanuel Macron dont le quinquennat se révèle novateur en la matière», a-t-elle ajouté.

Le lourd dossier des archives algériennes qui va être ouvert en 2019 par le président français Emmanuel Macron est le troisième étage d’une normalisation sans précèdent que le président français compte mettre en œuvre pour solder les contentieux encore en suspens entre la France et l’Algérie.

Après son affirmation que la colonisation a constitué un «crime contre l’humanité», pendant la campagne présidentielle, Emmanuel Macron a récemment reconnu «les responsabilités de l’État dans la torture et les disparitions pendant la guerre d’indépendance algérienne». Entre les deux : le chantier des archives.

La question des archives reste une question majeure du contentieux historique entre l’Algérie et la France. L’enjeu des archives est politique et citoyen. Dans le cas de l’Algérie, les archives conservent les traces d’histoires individuelles qui hantent parfois, aujourd’hui encore, les familles. Et puis, surtout, les archives recèlent des preuves précieuses, comme celles qui sont nécessaires à l’acquisition de droits divers, retraites et pensions au premier chef.

Pour cette raison, le contentieux franco-algérien doit être dépassé, même s’il s’agit là d’un dossier complexe. Les autorités françaises avaient alors une doctrine en matière de répartition des archives dans des contextes de transfert de souveraineté. Cette doctrine distingue les archives dites «de souveraineté» et les archives dites «de gestion».

Les premières, concernant l’exercice du pouvoir, sont appelées à être transférées en France. Il s’agit essentiellement, dans le cas de l’Algérie à la période coloniale, des archives du gouvernement général ainsi que de celles des préfectures et sous-préfectures.

Les secondes, les archives «de gestion», sont appelées à rester dans le pays. Celles-ci sont en effet les archives produites par l’administration dans son activité quotidienne. Il s’agit, notamment, de l’état civil, du cadastre, de registres comme les registres d’écrou des prisons.

Ces archives «de gestion» sont appelées à rester sur place car elles sont indispensables à la continuité de l’action administrative. Les autorités algériennes rejettent cette distinction.

Depuis 1962, elles n’ont eu de cesse de dénoncer leur dépossession et de demander la restitution de tous les documents. Un accord a pu être trouvé sur les seules archives ottomanes que les autorités françaises avaient transférées, en pleine contradiction avec leur « propre doctrine ».

Pour le reste, les positions françaises et algériennes sont incompatibles et c’est pour cette raison, précisément, que la question des archives continue d’être traitée au plan diplomatique.

Un bilan global des fonds conservés en France reste difficile à établir car en dépit des efforts soutenus pour produire régulièrement des inventaires, les Archives nationales d’outre-mer (ANOM), à Aix-en-Provence, conservent encore des fonds non classés.

En Algérie, le retour de la sécurité au début des années 2000 a permis à des chercheurs étrangers, au premier rang desquels un trio pionnier de doctorants aixois, d’effectuer des séjours de recherche sur place. Ainsi ont-ils pu constater la richesse des fonds restés en Algérie et leurs apports à l’écriture de l’histoire.

Depuis le début des années 2000, d’autres chercheurs ont fait part de leur expérience afin d’encourager les séjours de recherche dans les centres d’archives algériens. L’écriture de l’histoire de la colonisation en Algérie n’est pas empêchée car les fonds d’ores et déjà repérés et accessibles sont riches et nombreux.

Sans compter qu’aux archives publiques s’ajoutent les papiers privés ainsi que la possibilité de procéder à des enquêtes orales. Ainsi l’histoire sociale de l’Algérie à la période coloniale souffre des lacunes en matière d’archives locales.

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