Rapport Stora sur le mémoriel : Premières « fuites », premières déceptions…

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L’historien français Benjamin Stora a remis mercredi à Emmanuel Macron son rapport « sur les questions mémorielles portant sur la colonisation et la guerre d’Algérie ». Les premiers morceaux choisis commencent à être fuités dans la presse française ; et de ces premières brides surviennent les premières déceptions algériennes, car le contenu est loin de répondre aux attentes des Algériens.

Dans ce rapport, Benjamin Stora, spécialiste reconnu de l’histoire contemporaine de l’Algérie, préconise notamment de créer en France une commission « Mémoires et Vérité », chargée de proposer des « initiatives communes entre la France et l’Algérie sur les questions de mémoire », de restituer à l’Algérie l’épée d’Abdelkader, héros de la résistance à la colonisation française au XIXe siècle, de reconnaître l’assassinat par l’armée française de l’avocat et dirigeant nationaliste algérien Ali Boumendjel en 1957 ou encore de faire entrer l’avocate anticolonialiste Gisèle Halimi, décédée le 28 juillet 2020, au Panthéon qui accueille les héros de l’Histoire de France.

Une des premières grosses propositions concerne les harkis, ces agents qui avaient de manière délibérée choisi leur camp. Benjamin Stora, qui présidera cette commission, souhaite, écoutez-bien, « faciliter les voyages en Algérie des harkis, ces supplétifs algériens qui ont combattu pour la France, œuvrer à la préservation des cimetières européens et juifs dans le pays et faciliter le travail des historiens sur la question douloureuse des disparus algériens et européens ».

   Autre « surprise », le nivellement entre colonisateurs et colonisés, entre bourreaux et victimes, comme si ce furent les Algériens qui ont envahi et colonisé, « pacifié » puis terrorisé les populations autochtones. Ecoutez bien ce passage, livré par « Le Monde ».

« La représentation du passé n’est pas un acte anodin quand il s’agit de la guerre d’Algérie, touchant à plusieurs groupes de personnes traumatisées (soldats, officiers, Algériens, immigrés, harkis, pieds-noirs) ; et quand ces représentations entrent en contradiction avec des discours dominants, officiels. La réminiscence devient alors moins évidente, plus douloureuse, et l’analyse de ce passé est plus confuse, délicate. Pour les sociétés française et algérienne, que faire de toutes les traces de guerre qui hantent les mémoires ? Quel statut donner aux souvenirs des uns et des autres ? Quelle interprétation faire de ces silences que les sociétés accumulent pour continuer à vivre ensemble ? Et faut-il tout raconter, tout dévoiler des secrets de la guerre ? La question de la fidélité de la mémoire, de la représentation de la chose passée n’est pas évidente. (…)

    Lisez encore : « Soixante ans après, l’histoire est encore un champ en désordre, en bataille quelquefois. La séparation de l’Algérie et de la France, au terme d’un conflit cruel de sept ans et demi, a produit de la douleur, un désir de vengeance et beaucoup d’oublis. Les mémoires sont composites : nostalgie langoureuse du pays où “la mer est allée avec le soleil”, Atlantide engloutie de l’Algérie française, hontes enfouies de combats qui tous ne furent pas honorables, images d’une jeunesse perdue et d’une terre natale à laquelle on a été arraché. (…) »

Pas de réaction officielle en Algérie

Interrogé par l’AFP, le directeur des archives nationales, Abdelmadjid Chikhi, chargé d’un travail en parallèle sur la question mémorielle, n’a pas souhaité réagir « pour le moment ». Mais on devine facilement que la réaction ne tardera pas. Le journal français Libération lui-même s’inquiète aussi du dossier des harkis:« La proposition de Benjamin Stora de voir avec les autorités algériennes la possibilité de faciliter les déplacements des harkis et leurs enfants entre la France et l’Algérie risque de devenir vite un foyer de tensions entre les deux pays « . Le quotidien rappelle en effet qu’Abdelmadjid Chikhi a par le passé déclaré que le dossier des harkis serait « hors des discussions » en soulignant « que leur départ en France a été un libre choix ».

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