Canniers d’Ath Houel Hadj (Tizi-Ouzou) : des artisans au service des personnes fragilisées

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Fabricants de cannes traditionnelles de père en fils, les artisans du village d’Ath Houel Hadj, dans la commune d’Ait Yahia Moussa, au sud-ouest de la wilaya de Tizi-Ouzou, perpétuent ce métier ancestral pour être au service des personnes fragilisées.

Les personnes âgées ou à mobilité réduite sont la principale clientèle des artisans canniers d’Ath Houel Hadj. Ces citoyens qui, pour des raisons liées à l’âge, à un handicap, ou à une maladie telle que la phlébite ou l’insuffisance veineuse, qui rendent pénibles les déplacements des personnes atteintes, recourent à une canne pour une mobilité autonome.

Le choix se fait alors entre une canne moderne ou artisanale, et à Tizi-Ouzou, de nombreuses personnes âgées rencontrées par l’APS à la veille de la célébration de la journée nationale de l’artisan (9 novembre), la préfère traditionnelle, taillée dans une branche d’olivier ou d’oléastre, appréciée pour sa robustesse et le fait qu’elle soit issue d’un matériau naturel.

Des cannes en bois d’oléastre et personnalisables, on en trouve à Ath Houel Hadj, un village d’environ 800 habitants, ou les artisans produisent ces accessoires utiles à la marche, mais aussi pour accompagner une tenue traditionnelle, notamment le burnous blanc tissé de laine et de fil de coton, ou la Kechabia fabriquée à partir de poils de chameau, a-t-on appris des fabricants de cannes.

« Nous exerçons un métier qu’on peut qualifier de +solidaire+ car les objets que nous fabriquons avec tant de passion sont destinés, principalement, à une catégorie spécifique de la société, celle des personnes fragilisées et cela nous inculque l’humilité, l’esprit d’entraide et le respect de l’autre », ont témoigné Saïd Ouslimane Mahour et Merzak Meziani.

« Voir les cannes que nous fabriquons utilisés par des personnes à mobilité réduite renforce en nous le sentiment d’être utiles pour notre société et surtout pour ces citoyens qui pourront ainsi s’y appuyer et vaquer à leurs occupations, ou tout simplement sortir prendre l’air », ont-ils ajouté.     

Outre cette catégorie, la canne est aussi un outil indispensable pour les habitants des zones montagneuses aux chemins escarpés et pour les randonneurs, ont-ils souligné.

Le métier était une source de revenu durant la Révolution

Le métier de cannier a été introduit au village Ad’th Houel Hadj vers 1922 par un de ses habitants, Mohamed Redouani dit Mo-Ouaâmar, tombé au champ d’honneur durant la guerre de libération nationale, témoigne M. Ali Meziani.

Mohamed Redouani a appris le métier aux membres de sa famille puis à tous les villageois qui l’exerçaient en famille, le transmettant de père en fils, a ajouté M. Meziani.

Pendant la Révolution, le village, qui a donné beaucoup de moudjahidine, était très affecté économiquement suite aux représailles répétées de l’armée coloniale. Les habitants ont dû se tourner vers le métier de cannier pour avoir un petit revenu, un minimum pour survivre, a-t-il ajouté.

Fruit d’un savoir-faire local jalousement préservé, développé et amélioré au fil des générations, aujourd’hui, la canne artisanale des Ath Houel Hadj, fabriquée selon une méthode que les villageois préservent jalousement et refusent de dévoiler pour éviter toute imitation, est très prisée par ses utilisateurs et se vend partout à travers le territoire national, ont souligné Saïd Ouslimane Mahour, Merzak Meziani et Ali Meziani.

« Le secret d’une bonne canne artisanale qui sert d’appui et donc destinée à supporter une lourde charge qui est une partie du poids du corps humain, de longues heures durant, est sa poignée. La canne d’Ath Houel Hadj est réputée pour la robustesse de sa poignée qui ne se casse pas, grâce à un processus de fabrication développé localement », ont indiqué à l’APS les artisans du village qui préfèrent garder secret leur mode de fabrication.

Des ventes se font dans plusieurs wilayas, a-t-on appris des canniers rencontrés au village. Il s’agit principalement de Relizane, Annaba, Constantine, Oum El Bouaghi, Oran, Sidi Belabes, Laghouat, particulièrement la commune d’Aflou, et Tiaret.

Dans les zones agropastorales, les cannes sont utilisées aussi bien par les bergers que par les marchands de bétails, car permettant à ces derniers de s’y appuyer et de supporter de longues heures d’attente d’une vente, selon des artisans.

Les artisans d’Ath Houel Hadj reçoivent des commandes par téléphone, développement technologique oblige, facilitant les démarches de négociation. Ils fabriquent les cannes selon les exigences du client.

Les commandes sont de 400 à 500 par commande et peuvent aller jusqu’à 600 et 700 cannes par artisan, a-t-on appris des concernés.

Le prix de ce produit artisanal se situe entre 300 et 400 DA la canne, mais certaines, de haute qualité, sont cédées contre 2.000 DA l’unité, a souligné M. Mahour.

Aujourd’hui, les artisans d’Ath Houel Hadj œuvrent à préserver leur métier, principale activité économique et touristique du village, en lançant l’été dernier le premier festival de la canne artisanale, un espace d’échange et de débat autours de la promotion de ce patrimoine ancestral.

APS

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