Quelques remarques sur le plan de relance économique de l’Algérie

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Le Président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune a présidé, le 07 juillet 2020, une séance de travail, en présence du Premier ministre et des ministres des Finances, de l’Energie, de l’Industrie et des Mines, du Commerce, de l’Agriculture, ainsi que du ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé de la Prospective. Cette séance de travail a été consacrée à l’examen du projet de Plan national de relance socio-économique, à soumettre aux prochaines réunions du Conseil des ministres

1.-Les huit axes directeurs du plan de relance

1.1.-d’opérer des réformes structurelles à même d’assurer une exploitation optimale et transparente de toutes les potentialités et richesses naturelles nationales, à commencer par les mines dont regorge l’Algérie,


1.2.-
de l’exploitation de la mine de fer de Ghar-Djebilet dans la wilaya de Tindouf et du gisement de Zinc de Oued Amizour dans la wilaya de Béjaïa,

1.3.- l’édification d’une véritable nouvelle économie passe par le changement des mentalités et la libération des initiatives de toute entrave bureaucratique, la révision des textes juridiques en vigueur, ou leur adaptation en fonction de la logique économique et non des pratiques conjoncturelles, ce qui permettra de mieux exploiter le génie national et de générer les richesses et les emplois sans exclusion, ni exclusive,

1.4.- l’impératif de générer de la valeur ajoutée dans chaque projet, appelant à explorer toutes les terres, y compris les terres rares, aux fins d’amortir le recul des recettes de l’Etat,

1.5.-au ministre de l’industrie  de présenter les cahiers des charges déjà disponibles, lors du prochain Conseil des ministres, et d’optimiser les dérivés du pétrole et du gaz en vue de revoir le Produit national à la hausse,

1.6-rechercher des mécanismes efficaces à même de réduire, à court terme, les dépenses inutiles, d’augmenter les revenus à travers l’encouragement de la production nationale, la généralisation de la numérisation et la lutte contre l’évasion fiscale, le gaspillage et la surfacturation

1.7.-préserver le caractère social de l’Etat et le pouvoir d’achat du citoyen, notamment la classe défavorisée,

1.8.- assurer le dialogue avec les partenaires où le Plan de relance socio-économique sera présentée à tous les opérateurs économiques algériens, une fois approuvée en Conseil des ministres

2.-remarques

2.1-Tout plan fiable reposant sur une nouvelle gouvernance nationale et locale avec plus de décentralisation et non déconcentration, à travers des réseaux et non plus avec l’ancienne organisation hiérarchique rigide tant de l’Etat que des entreprises, impliquant les élus locaux et la société civile ( entrepreneurs publics, privés, banques, universités, centre de recherche, associations) doit partir du général, du macroéconomique et macro social interne, puis aux  réseaux intermédiaires et enfin au niveau micro économique aux projets fiables dans le cadre des avantages comparatifs, ne pouvant pas tout produire

2.2-Tout plan opérationnel doit s’inscrire dans le cadre d’une vision stratégique tant des mutations internes qu’internationales, comment s’oriente les filières au niveau mondial entre 2020/2030 qui dominée par la bonne gouvernance et le primat du savoir avec la transition numérique et énergétique, en étant réaliste les hydrocarbures traditionnels resteront encore pour 5 à 10 ans la principale ressource en devises du pays sous réserve de la mise en place de nouvelles filières concurrentielles.

2.3– au niveau national, élaborer de stratégies d’adaptation pour couvrir à la fois le marché intérieur et les exportations hydrocarbures e t autres et en conciliant l’efficacité économique et la cohésion sociale par le dialogue social

2.4– comment mobiliser les ressources tant humaines et ajuster les ressources financières  en distinguant la partie dinars et la partie devises avec un planning daté pour éviter les réévaluations permanentes, des projets non maturés afin de lutter contre les surcoûts, en dressant une balance devises afin d’éviter l’épuisement des réserves de change horizon 2022.

3.-Qu en es t-il  pour le fer de Gara Djebilet ?

3.1-Le ministre de l’industrie a annoncé en juin 2020, qu’entre les projets de phosphate et celui de Gara Djebilet il faudra mobilier entre 15/169 milliards de dollars alors que les réserves de change sont passées de 194 milliards de dollars au 01 janvier 2014 et clôtureront à moins de 40 milliards de dollars fin 2020. Les réserves mondiales de fer évaluées selon les organismes internationaux à 85 000 millions de tonnes. L’Australie arrive en tête avec 24. 000 Mt, suivi de la Russie 14. 000 Mt, du Brésil 12 000 Mt, de la Chine 7. 200 Mt, de l’Inde 5 200 Mt, Etats-Unis 3 500 Mt, du Venezuela 2 400 Mt, de l’Ukraine 2 300 Mt, du Canada 2 300 Mt et de la Suède 2 200 Mt, l’Algérie selon les données algériennes (gisement exploitables) entre 1 500 et 2 000 Mt. Pour la production de fer, la production mondiale de fer s’élève 3,32 milliards de tonnes entre 2018/2019 avec un prix très fluctuant entre 55/80 dollars la tonne ces dernières années. La Chine est le leader du marché du minerai de fer, avec 1,38 milliard de tonnes de minerai extraites, loin derrière, l’Australie 824 Mt, le Brésil,428 Mt, l’Inde 129 Mt, et la Russie 112 Mt  

3.2- Pour le fer de Gara Djebilet, la découverte de ce gisement date depuis les années 1950 avec les études du Bureau de recherche minière en Algérie en 1953, le Bureau d’investissement en Afrique en 1959, le Service d’études et recherches minières en 1961 jusqu’aux premières tentatives de développement à titre expérimental du site avec l’entrée en scène de la Sonarem après la nationalisation des mines, dont l’effort d’expérimentation a été stoppé net en 1975  suite à la guerre au Sahara occidental. Les avis d’appels internationaux à manifestation d’intérêt lancés par Sonatrach, détenteur depuis 2009 du titre minier (adjudication, exploration) n’ont pas connu le succès escompté. Resté au stade de la «préfaisabilité», le dernier «projet intégré de Gara Djebilet», mis sur pied en 2005  prévoyait aussi bien l’exploitation proprement dite jusqu’à la production du fer. Ce projet intégrait l’extraction du minerai de fer avec option pour son enrichissement sur place, son transport par voie ferroviaire (projet de chemin de fer reliant Tindouf à Béchar) vers le nord du pays, une usine sidérurgique proche d’un port en cas d’exportation d’une partie du produit et la construction d’une cité minière près du site appelé à accueillir une importante main-d’œuvre.

3.3- Le 7 juin 2020, le fer  est coté bourse à 78 dollars la tonne alors que la tonne d’acier à 486 dollars la tonne devant donc pour avoir des recettes fiables descendre à l’aval. Car même si l’Algérie exportait 10.000 tonnes brutes par an , la recette annuelle serait seulement 280.470.000 dollars, montant auquel il faudrait retirer 40/50% de coûts, salaires plus coût de transport  vers les ports, car très capitalistique sans parler de la part des associées étrangers restant à peine 120 millions de dollars, alors que pour l’acier la recette serait six fois plus élevé. Mais cela nécessiterait d’importants investissements impliquant, du fait de la faiblesse des réserves de change (moins de 40 milliards de dollars fin 2020)  un partenariat gagnant /gagnant en précisant que quatre à cinq grandes multinationales contrôlent les circuits commerciaux de cette filière. Il en est de même du phosphate brut (réserves d’environ 2,2 milliards de tonnes) dont le brut est coté le 08 juin 2020 à 118 dollars la tonne et le zinc dont le cours est plus élevé à 1900 dollars la tonne. Ainsi en plus du fer et phosphate l’Algérie recèle d’autres importants gisements plus d’un milliard de tonnes de sel, plus de 100 millions de tonnes de plomb et de zinc, plus de 100 tonnes d’or, 24 millions de tonnes de wolfram, 1,4 million de tonnes de manganèse, 6,3 millions de tonnes de célestine, 22 millions de tonnes de barytine, 6,5 millions de tonnes de kieselguhr, 7 millions de tonnes de feldspath. Cependant évitons les mythes car aucun pays ne s’est développé avec des exportations de matières premières brutes et là on revient au savoir pour descendre dans l’arbre généalogique de ces filières pour voir une forte valeur ajoutée.

En résumé, l’essentiel est une nette volonté politique de concrétisation sur le terrain, pour résoudre les tensions sociales, créer 360.000/400.000 demandes additionnelles par  an, avec une pression démographique galopante,  qui s’ajoute au taux de chômage actuel, car nous avons assisté par le passé à différentes plans qui ne sont jamais concrétisés, récemment le fameux modèle économique de 2017/2018. Espérons pour une fois que la réussite de ce plan  qui implique  une mobilisation générale, reposant sur un sacrifice partagé, devant privilégier les intérêts supérieurs de l’Algérie en cette conjoncture de crise mondiale exceptionnelle, et taire nos divergences secondaires, L’exigence est une meilleure gestion dans l’allocation des ressources évitant des projets de prestige qui conduisent le pays nulle part, une lutte contre la corruption par  la réhabilitation des institutions de contrôle dont la Cour des comptes en léthargie, organe suprême, dépendante non de l’exécutif, ne pouvant pas être juge et partie, mais de la présidence de la république selon la constitution ( l’actuel président de la cour des comptes n’étant pas changé depuis 1995), mais ne devant pas confondre acte de gestion avec corruption afin de ne pas  décourager les managers qui doivent prendre des risques, devant également éviter de créer d’autres institutions qui se télescopent.

En bref, comme j’ai tenu à le souligner dans plusieurs interventions internationales, (USA-Europe), l’Algérie est un pays dynamique, plein de vitalité, qui se cherche et cherche sa voie étant un acteur déterminant, selon la majorité des observateurs internationaux, de la stabilité de la région méditerranéenne et africaine, sous réserve d’un renouveau de la gouvernance dont la moralisation de la société sans laquelle aucun développement ne peut se faire.

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