La rentrée scolaire 2019/2020 entamée quel est le premier constat tirez-vous ?
Cette rentrée 2019/2020 intervient dans une période très sensible de notre histoire. Qu’on le veuille ou non, la révolution du 22 février a déteint de façon manifeste, sur le déroulement de cette rentrée scolaire et sociale. Les élèves et les enseignants ont rejoint les établissements entre appréhensions, craintes et espoir. Aude là de cet esprit de révolte, la rentrée scolaire s’est déroulée de façon mitigée à Bejaïa même au niveau national. Il est constaté des insuffisances diverses, des surcharges de classes, des problèmes d’infrastructures, des manques de moyens pédagogiques et des retards dans les versements des arriérés des enseignants …etc.
Certains vous accusent de mettre de coté les doléances socioprofessionnelles de vos adhérents de coté, en s’impliquant dans la révolte citoyenne depuis le mois de février ?
Je ne suis pas d’accord avec ce constat. Nous n’avons jamais cessé l’activité syndicale relative à la prise en charge des préoccupations socioprofessionnelles de notre corporation. Un suivi permanent est assuré. Toutefois, la conjoncture délicate que traverse le pays interpelle tout Algérien soucieux de la stabilité et de l’avenir de la nation. Aussi, il est tout à fait naturel que nous nous investissions dans cette révolution en cours et converger avec les autres forces vives du pays pour participer à cette dynamique historique et hâter la naissance de la nouvelle république tant espérée par des millions d’Algériens.
Parle nous de l’apport du CNAPESTE dans le mouvement citoyen au double pan wilaya et national ?
Le CNAPESTE était déjà sur le terrain des luttes depuis des années. Tout le monde a pu constater l’instrumentalisation des tribunaux contre notre syndicat, les différentes intimidations, les répressions et les harcèlements arbitraires, voire les mises sous contrôle judicaires de nos représentants….etc. Les différents mouvements de grève au double plan wilaya et national, les différents rassemblements et marches organisés dans ce cadre montrent l’implication de notre syndicat dans cette dynamique citoyenne. Pour nous, l’arrivée de cette révolte de peuple algérien pour se réapproprier sa souveraineté, est un aboutissement logique des différents combats menés autant par la société civile, les partis politiques d’opposition et les syndicats autonomes. Nous nous associons à toutes les démarches tendant à promouvoir l’exercice syndical, à ouvrir davantage le champ politique et médiatique, à donner plus de liberté et d’indépendance à la justice, à instaurer un processus transitionnel afin de concrétiser le vœu des Algériens pour une Algérie meilleure et une démocratie majeure.
Nous faisons nôtres les revendications soulevées par le peuple algérien. Notre engagement et détermination pour continuer la lutte jusqu’à l’aboutissement des aspirations du peuple, restent intacts. En effet notre implication active dans la révolte n’est que consécration du slogan phare de notre syndicat : Ecole-Militantisme-Citoyenneté.
Les algériennes et les Algériens s’engagent avec force et détermination dans toutes les actions malgré les arrestations arbitraires et les atteintes aux libertés, qu’en dites-vous ?
C’est le propre du peuple algérien de ne jamais abdiquer devant les répressions et les menaces. Depuis l’indépendance, les clans ont confisqué les centres de décisions politiques. Le peuple algérien est mis sous tutelle de potentats militaro-policiers qui ont une haine de tout ce qui fait penser à la démocratie et aux droits de l’homme.
Malgré cela, le peuple ne s’est jamais complu dans le silence. Il y a eu à chaque période, ses révoltes et ses soulèvements et il y avait toujours des voix qui s’insurgeait contre ces politiques dilapidatrices des richesses du pays. Que de militants n’a-t-on pas harcelé, torturé et conduit au cachot pour la simple raison qu’ils revendiquaient un plus de justice et de liberté. Il y avait même des opposants qui ont payé de leur vie leurs engagements. On ne doit pas oublier leurs sacrifices. Dans ce cadre justement, j’appelle à la libération immédiate et inconditionnelle de tous les détenus d’opinion.
Le pouvoir joue au rouleau compresseur pour imposer sa feuille de route voir imposer son candidat au scrutin présidentiel, qu’en pensez-vous ?
Imposer une feuille de route contre le gré du peuple algérien ne peut que compromettre l’avenir du pays. Le bon sens voudrait en cette phase critique d’écouter les revendications citoyennes et d’y apporter des solutions appropriées. Toute imposition ne peut être que contre productive. Ce qu’il faut, c’est un dialogue franc, inclusif sans exclusion, avec comme préalables, le départ du système, de ses symboles et de ses résidus et le respect du caractère républicain, démocratique et social du pays. Ce dialogue qui sera rehaussé par de véritables négociations, doit être encadré par des personnalités nationales consensuelles.
Chose facile à réaliser si la volonté existe. Malheureusement, l’agenda des décideurs actuels n’a d’autres objectifs inavoués que la reconduite du système et la pérennisation du régime à travers une présidentielle pourtant rejetée par le peuple. L’interdiction d’entrer à Alger pour participer aux marches pacifiques que vient de décréter le chef d’état major n’est que l’illustration d’un aveuglement sans précédant, d’une tentative avérée du recours à la violence pour réussir sa mascarade électorale.
Sur le triple plan politique, économique et social quels sont les risques et les dangers que le pays va affronter ?
Déjà sur le plan économique, on est, selon, nos experts et les institutions financières internationales, en phase d’être en cessation de paiement. Tous les indicateurs sont au rouge, seul un éventuel rebond significatif des prix du baril de pétrole peut en atténuer les conséquences. Les politiques mises en place depuis des années durant sont entachées de corruption institutionnalisée. Le pouvoir d’achat se rétrécit dangereusement de jour en jour.
Les secteurs de l’éducation et de la santé qui sont les baromètres de la bonne santé d’un pays, sont précarisés. Les quelques avancées timides en politique enregistrées ces dernières années, fruits des sacrifices des Algériens, viennent d’être remises en cause par ce pouvoir dirigée réellement par l ‘Etat –major qui s’accapare présentement le pouvoir décisionnel sur tous les plans, économique, social et politique. Si cette situation perdure, on fera face à des débordements sociaux incontrôlables dont la responsabilité incombe aux décideurs actuels. Ce qui nous amène à réitérer notre appel pour un sortie de crise telle que voulue par le peuple, à savoir une transition démocratique.