Quelque 15000 personnes meurent annuellement en Algérie à cause du tabagisme. Véritable fléau, le tabagisme constitue actuellement en Algérie, la première cause de mortalité. A l’occasion de la journée mondiale sans tabac, nous avons interrogé le psychologue Mourad Touak sur ce fléau qui touche plus de 15% de la population algérienne.
L’Express DZ : Vous avez dans vos ouvrages sur le développement personnel consacré un chapitre sur le tabagisme et vous étés conviés souvent à parler de ce thème en milieu scolaires, quel regard portez-vous sur la prévention et la lutte contre le tabagisme en Algérie ?
Mourad Touak : Effectivement, j’ai consacré un chapitre sur le tabagisme dans mes deux ouvrages « Le champ du bonheur » et « Abrid n alwit » écrits en français en Kabyle. Vous savez même si tout le monde connait les risques du tabagisme, mais il reste que les fumeurs en général, s’en tapent royalement et oublient que prévenir vaut mieux que guérir. Pour ma part, Je réponds tout le temps favorablement aux invitations des associations, des établissements scolaires et des médias (journal, télé, radio) quand il s’agit de traiter de ce sujet. Mieux encore, je fais ce genre de conférences-débats sur le tabac, de bon gré, avec un grand plaisir, sachant que je contribue d’une façon ou d’une autre à l’amélioration de la santé publique. Concernant la prévention dans notre pays, il faut dire qu’elle reste très faible. Les quelques campagnes anti-tabac organisées ça et là, de temps en temps sont inefficaces et les chiffres sont là pour démontrer l’insuffisance des dispositifs mis en place dans ce cadre.
Quels sont les recommandations que vous donnez pour aider ceux qui veulent arrêter de fumer ?
Moi, j’insiste surtout sur le coté psychologique de la chose. J’insiste souvent sur cette vérité acceptée par tous : « quand on veut, on peut ». Tout est lié à la volonté. Pour tout projet, ce qu’il faut retenir, c’est d’avoir le courage de commencer, de savoir garder l’espoir pour arriver, d’avoir confiance en soi et de persévérer quelque soient les aléas que l’on peut rencontrer, ce sont-là, les bases universelles de la voie qui mène vers la réussite.La consommation de la cigarette et du tabac d’une manière générale, est considérée comme un comportement acquis. Soit, il est appris par imitation (adultes, parents, enseignants, acteurs préférés…) soit par quête de virilité ou encore, notamment pour les adolescents, par peur d’être exclu par un groupe d’amis.Puisque la consommation de la cigarette est un comportement appris, alors on peut le remplacer par un autre comportement, celui d’arrêter de fumer. Puisque un fumeur c’est lui qui a cherché et qui continue à chercher quotidiennement la cigarette en dépit de sa nocivité, alors, c’est à lui seul aussi de prendre la décision de la quitter avant qu’il soit trop tard.Les fumeurs doivent s’inspirer des expériences des gens qui ont arrêté de fumer, garder en tête l’histoire des gens décédés à cause du tabac, regarder souvent des documentaires traitant des effets néfastes du tabagisme. Ceci contribue à provoquer le dégoût puis la peur qui mène généralement à la décision d’arrêter de fumer. Le fumeur doit, au début, commencer par réduire à petite dose sa consommation avant de l’arrêter carrément de fumer. Comme disait Lao Tseu « Le voyage d’un millier de kilomètres doit commencer par un simple pas », alors une simple décision peut transfigurer votre vie. N’oublions pas aussi le coté économique sur lequel, il faut aussi insister. Un Algérien en moyenne, dépense entre 200 DA et 500 DA par jour soit 6000 à 15000 DA par mois. Autant dire la moitié du salaire d’un smicard. En tous cas en terme de recommandations, j’insiste pour ma part sur la qualité de vie d’un fumeur et d’un non fumeur, en touchant aussi bien le coté sanitaire et le coté économique.
Est –ce que les mises en garde sur les paquets de cigarettes telles que « Fumer tue »ont un quelconque impact sur les fumeurs ?
Ces mises en garde sanitaires imposées aux cigarettiers par l’ OMS suscitent évidemment la peur et le dégout. Mais, il faut dire aucune étude n’a été menée en Algérie pour faire une évaluation réelle de l’impact de ces messages sur le comportement des fumeurs.
Que doit faire les pouvoirs publics pour lutter concrètement contre le tabagisme ?
Les pouvoirs publics doivent faire de la lutte contre le tabagisme l’une priorité de la santé publique. Ils doivent mettre les moyens nécessaires pour cela. L’école et les médias lourds doivent constituer les deux piliers sur lequel doit se construire l’édifice de la lutte contre le tabagisme. La lutte et la prévention contre ce fléau doivent être des pratiques quotidiennes et non conjoncturelles comme cela se fait actuellement. Responsables et spécialistes de divers horizons doivent conjuguer leurs efforts pour trouver les meilleures recettes pour lutter efficacement contre ce fléau. Maintenant, on peut déjà commencer par l’interdiction de toute sorte de publicité sur le tabac. Les étagères attirantes conçues spécialement pour les paquets de cigarettes de toutes couleurs qu’on trouve aujourd’hui dans nos librairies et nos kiosques qui incitent plutôt à fumer. On vit dans un environnement qui fait dans la promotion la cigarette, à telle enseigne qu’elle se vend partout, dans les cafés, les superettes en absence de tout contrôle.