La problématique du financement de l’économie algérienne suppose une vision stratégique

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L’économie algérienne à l’aube de la quatrième révolution économique mondiale qui s’annonce inéluctable est à la croisée des chemins. Cette présente contribution  pose un des fondement stratégique du développement ,  celui de son  financement

Professeur des universités, expert international Dr Abderrahmane MEBTOUL

1.-Si la situation économique est difficile, posant la problématique de  la sécurité nationale,  il faut éviter toute vision de sinistrose. A la différence   des impacts  de 1986, l’Algérie dispose d’importantes  réserves de change  de plus de 97 milliards de dollars  fin 2017 non inclus les réserves d’or d’environ 7 milliards  de dollars, et surtout d’une importante épargne intérieure ayant un répit de trois années. Il faut analyser le fonctionnement de la société et éviter de pondre des lois déconnectées de la réalité Dans ce cadre la décision en date du 02 mars 2016 de recourir à un emprunt national  à un taux d’intérêt  de 5% pour le moyen terme, a eu un résultat très mitigé du fait du manque de confiance, fondement de tout  processus de développement.  Tout soumissionnaire  est attentif à la cohérence et visibilité  de la politique économique( récemment la politique du commerce extérieur est chaotique) , de la  maîtrise de l’inflation et  de la valeur du dinar par rapport tant au dollar qu’à l’euro, du  marché officiel et du marché parallèle. En cas de dérapage accéléré  du dinar  et d ‘un taux d’inflation réel élevé (corrigé par les subventions), les ménages étant rationnels  iront  vers des valeurs refuges comme les devises, l’or ou l’immobilier. Certes le gouvernement  a écarté le recours à  l’endettement extérieur mais à court terme.  Mais en  cas de persistance de la baisse du cours  du pétrole,   le recours à l’endettement extérieur ciblé à moyen et long terme,  pour des segments créateur de valeur ajoutée  et non les importations ne  permettrai-il pas   d’atténuer la baisse des réserves de change qui tiennent  la cotation du dinar via la rente des hydrocarbures à  plus de 70% ?   Sonatrach pourra t- elle  consacrer un plan d’investissement de 70 milliards de dollars entre 2017/2020  et Sonelgaz , structurellement déficitaire, 100 milliards de dollars entre 2017/2025  même à un cours moyen de 70 dollars à prix constants dont plus de 70% en devises, ce cours du pétrole  donnant le chiffre d’affaire auquel il faut  soustraire 20/25% de cout pour avoir le profit ne?. Aussi, il faut  cibler les segments pour assurer   la rentabilité, fonction du vecteur prix  international et du coût supposant un  nouveau management stratégique interne pour rationaliser les dépenses et ce dans tous les secteurs  productifs mais également les administrations et des services collectifs dont la gestion fonctionne encore sur des schémas du début des années 1950  Nous avons deux solutions : un partenariat gagnant /gagnant  avec l’international, soit aller vers les marchés   de capitaux internationaux. Par ailleurs,  il s’agit impérativement de dynamiser la bourse d’Alger en léthargie depuis sa création comme moyen de financement.

2. –Je recense  sept axes pour  la dynamisation de la Bourse d’Alger

a.-Premièrement, la levée des contraintes d’environnement dont les entraves de la bureaucratique impliquant la refonte de l’Etat dans de nouvelles missions devient urgent.  Il ne peut y avoir de bourse sans entreprises  concurrentielles ayant des bilans positifs et une visibilité dans la politique socio-économique,   évitant les instabilités juridiques.  Cela n’est pas facile comme le démontre d’ailleurs les scandales financiers au niveau mondial supposant de la transparence.

b-Deuxièmement, une bourse doit se fonder sur un système bancaire rénové.  Or, le système financier algérien depuis des décennies est le lieu par excellence de la distribution de la rente des hydrocarbures et donc un enjeu énorme du pouvoir. La dynamisation de la bourse passe forcément par la refonte du système financier algérien qui porte en lui la substance de l’enjeu du fait qu’il cadre parfaitement la politique économique développée jusqu’à présent et son corollaire les sources et les modalités de son financement.  En effet, malgré le nombre d’opérateurs privés, nous avons une économie de nature publique avec une gestion administrée. La totalité des activités quelques soient leur nature se nourrissent de flux budgétaires c’est à dire que l’essence même du financement lié à la capacité réelle ou supposée du trésor. . On peut considérer que les conduits d’irrigation, les banques commerciales et d’investissement en Algérie opèrent non plus à partir d’une épargne puisée du marché, éventuellement un reliquat du travail mais par les avances récurrentes (tirage : réescompte) auprès de la banque d’Algérie pour les entreprise publiques qui sont ensuite refinancées par le trésor public sous la forme d’assainissement.   Or,  la richesse ne peut apparaitre que dans le cadre de la transformation du stock de monnaie en stock de capital, et là est toute la problématique du développement.  Puisque cette transformation n’est plus dans le champ de l’entreprise mais ce déplace dans le champ institutionnel (répartition de la rente des hydrocarbures), dans cette relation, le système financier algérien est passif.  Les surliquidités niveau de la société notamment au niveau de la sphère informelle,  montrent la difficulté de transformer le capital argent en capital productif,  le blocage étant d’ordre systémique.

c-Troisièmement, il ne peut y avoir de bourse sans la résolution de titres de propriété qui doivent circuler librement segmentés en actions ou obligations renvoyant d‘ailleurs à l’urgence de l’intégration de la sphère informelle par la délivrance de titres de propriété.

d.-Quatrièmement, il ne peut y avoir de bourse sans des comptabilités claires et transparentes calquées sur les normes internationales par la généralisation des audits et de la comptabilité analytique afin de déterminer clairement les centres de coûts pour les actionnaires.

e-Cinquièmement  posant  la problématique de l’adaptation du système socio-éducatif, urgence de créer un Engineering financier national avec des interactions entre technologues, juristes, économistes, sociologues,  financiers inexistant en Algérie. Or l’exode des compétences devient inquiétant sachant que le poste services au niveau de la balance des paiements fluctuant entre  10/11 milliards de dollars  entre 2010/2017  contre 2 milliards de dollars en 2002.

f.-Sixièmement, transitoirement comme amorce, nous proposons une privatisation partielle de quelques champions nationaux pour amorcer le mouvement et la création de fonds de partenariat Public/Privé pour sélectionner quelques entreprises privées en vue de leur introduction ultérieure en bourse. On pourrait mettre en bourse : 10% de Sonatrach ; 10 à 15% de BEA ; 10% de Sonatrach ; 15% de Cosider et 15% de CPA. Cela permettrait de constituer un indice boursier consistant en volume et en qualité amorçant le cercle vertueux et attirer des opérateurs privés. Ces fonds agiraient comme incubateurs de sociétés éligibles à la Bourse. Dans ce cadre, une aide au développement des acteurs privés du secteur de l’investissement (Conseillers IOB, gestionnaires d’actifs) est nécessaire.

g.-Septièmement, en cette ère de mondialisation où dominée par les grands espaces économiques, l’ère des micros Etats étant révolu, une bourse pour 40 millions d’habitants étant une phase intermédiaire, il serait souhaitable la création d’une bourse maghrébine, qui devrait s’inscrire dans le cadre de la future bourse euro-méditerranéenne prévue à ‘horizon 2020/2025, supposant au préalable la résolution de la distorsion des taux de change. Et cette intégration devrait dynamiser le tissu productif qui permettra d’accroître le nombre d’acteurs au niveau de la bourse. Hélas, le commerce intermaghrébin– en 2017 ne dépasse pas 3%, celui interafricain 15% le Maghreb et l’Afrique  étant marginalisés au niveau mondial.

3.-En résumé,   le grand problème pour l’Algérie  n’est pas seulement la baisse  du cours des hydrocarbures   mais la  rationalisation des choix budgétaires, la solution de facilité étant l’augmentation des taxes de certains produits mais en réalité qui ont un impact très faible pour la réduction du  déficit budgétaire, tout en occasionnant des tensions sociales inutiles. Il existe un   théorème universel :20% d’actions biens ciblées ont un impact de  80% et 80% d’actions désordonnées , faut de vision stratégique ont un impact seulement de 20% Le plus grand danger est la faiblesse de vision stratégique, de visibilité et de cohérence de la politique socio-économique  et la corruption qui gangrène toute la société   renvoyant à la morale. Aussi, le défi de l’Algérie, comme nous l’avons démontré  dans une audit pluridisciplinaire allant de l’histoire, au politique au social et à l’économique , remis au premier ministre en 2013,  suppose   une stratégie clairement définie dans le temps, une nette volonté politique  de changement de l’actuelle politique soc-économique naviguant à vue,  loin du juridisme de la mentalité rentière, et surtout la mobilisation de tous les Algérien

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