Algérie Europe : Deux partenaires stratégiques pour la stabilité de la région

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Il s’agit comme je l’ai souligné il y a quelques années lors d’une conférence, à l’invitation du parlement européen à Bruxelles, de dépassionner les relations car la stabilité des deux rives de la Méditerranée, nous impose d’entreprendre ensemble. Comme j’ai eu l’affirmer encore récemment lors de l’interview à la radio publique arabophone la chaîne une le premier mai 2018, dans plusieurs contributions nationales et internationales (voir site Mena Forum Bruxelles  09/05/2018) l’Algérie et l’Europe sont deux partenaires stratégiques.

Cela a été réaffirmé par  le  ministre des Affaires étrangères algérien lors d’une allocution prononcée à l’ouverture de la 11e session du Conseil d’association Algérie-UE le 14 mai 2018  à Bruxelles, seul porte-parole officiel, les affaires étrangères étant de la seule prérogatives du Président de la République, toutes les autres récentes déclarations n’engageant que leur propre personnes et non le gouvernement algérien.

Lors de cette rencontre l’Algérie a plaidé  pour le renforcement du «dialogue et de la concertation» entre l’Algérie et l’Union européenne (UE) en vue de «densifier» les relations bilatérales dans «l’intérêt mutuel et l’équilibre des intérêts et faire face aux défis communs de sécurité et de développement qui se posent à nous ».

Suite aux préoccupations soulevées par l’UE concernant ses parts de marché en Algérie suite aux mesures de rationalisation des importations prises par le gouvernement algérien dans un contexte bien particulier, le Ministre algérien s’est dit «profondément convaincu que les discussions engagées par les deux parties sur ce dossier permettront d’arriver à des solutions pragmatiques et acceptables qui prennent en ligne de compte les intérêts légitimes de chaque partie».

1. Le rapport européen du 03 mai 2018 l’Algérie un acteur déterminant de la  stabilité régionale

« Le gouvernement (algérien) suit de près l’évolution de ces crises, dans le but de « faciliter une solution contribuant ainsi à la stabilisation de son voisinage immédiat, notamment au Sahel. L’Algérie demeure un acteur-clé au niveau régional et international pour la sécurité. L’effort continu, (…) de modernisation des équipements, ainsi que les nombreux effectifs de sécurité dont l’Algérie dispose, ont permis au pays de contrer de façon efficace les menaces terroristes.  L’évolution de la crise libyenne et la situation complexe dans la région du Sahel ont amené l’Armée nationale populaire (ANP) à déployer des forces de sécurité supplémentaires aux frontières » selon l’exécutif européen dans son rapport sur l’état d’avancement des relations UE-Algérie en date du 03 mai 2018.

Aussi, contrairement à certaines prévisions pessimistes prédisant un scénario catastrophe pour l’Algérie horizon 2020, l’Algérie, sous réserve d’une bonne gouvernance et d’une réorientation de sa politique économique, a l’ambition de ses choixL’Algérie par exemple à travers les canalisations Medgaz et Transmed est un acteur stratégique pour l’approvisionnement en énergie de l’Europe ayant toujours respecté ses engagements commerciaux. Selon le plan de la compagnie nationale des hydrocarbures, Sonatrach, il est prévu un investissement de 73 milliards de dollars entre l’année 2016 et 2020, dédié au domaine de l’exploration. Considérée comme le 2e fournisseur en gaz pour l’Europe après la Russie, l’Algérie prévoit une augmentation de sa production de gaz de l’ordre de 141,3 milliards de m3 cube pour cette année, en vue d’atteindre 143, 9 milliard en 2018, et 165 milliards pour l’année 2020, la production de gaz algérien, affichant  une augmentation de 90 milliards de m3 annuellement, dont 50 milliards acheminés a travers les gazoducs vers l’Europe.

Ainsi, l’Algérie peut devenir un acteur déterminant de la stabilité de la région méditerranéenne et africaine,  conditionnée par son développement économique et social au sein de grands espaces régionaux, analyse soutenue dans mes interviews internationales notamment à Radio France Internationale RFI France le 27/02/2016/,  à l’American Herald Tribune du 28 décembre 2016 et au quotidien financier français la tribune.fr en février 2017. Réussir les réformes structurelles permettant le redressement national est possible. Pour cela, des réformes de structures doivent avoir pour finalité d’encourager l’investissement créateur de valeur ajoutée passant la refonte du système foncier, financier, douanier, fiscal, l’administration et une nouvelle régulation sociale au profit des plus démunis. Il y a urgence d’objectifs précis et une nouvelle organisation institutionnelle afin de donner plus de cohérence au management. Les débats contradictoires en association avec toutes les composantes de la société, tolérant les différentes sensibilités et la nécessaire cohésion sociale me semblent être la seule voie pour dépasser la crise multidimensionnelle actuelle, car les ajustements sociaux seront douloureux. Le cadre macro-économique relativement stabilisé en Algérie est éphémère sans de profondes réformes structurelles avec la baisse du cours des hydrocarbures, et le risque après l’épuisement du fonds de régulation des recettes, celui des réserves de change (2020/2022) afin d’éviter un retour au FMI.

2.Un dialogue productif pour régler les  différents

Dans son rapport du 03mai 2018, l’Union européenne saluant les efforts de l’Algérie en matière de sécurité et de défense au niveau de la région, comme mis en relief précédemment fait savoir « qu’elle a sollicité à plusieurs reprises le partenaire algérien et reste en attente de la proposition algérienne pour un nouveau calendrier de mise en œuvre des initiatives déjà discutées et agréées …Que 2015, l’Algérie a introduit une série de mesures protectionnistes, invoquant une détérioration de la balance de paiements, avec des effets négatifs de ces mesures sur les opérateurs de l’UE amplifiant  par le manque de prévisibilité et de communication préalable des autorités algériennes » et selon le dernier rapport « ces mesures sont contraires aux clauses de l’Accord d’association qui régit, entre autres, les relations commerciales entre l’UE et l’Algérie ».

Toujours pour l’Union européenne, « la création d’un cadre juridique stable et transparent, propice à l’investissement, ainsi que la réduction des subventions, la modernisation du secteur financier, et le développement du potentiel des partenariats public-privé font partie des réformes structurelles nécessaires qui doivent encore être menées, que l’investissement étranger doit également être encouragé; dans ce sens, assouplir la règle 51/49, au moins pour les secteurs non-stratégiques, serait bénéfique » Cela rejoint la déclaration devant l’Assemblée nationale française de  la Commissaire européenne au commerce, Cecilia Malmström, qui avait affirmé, mardi 10 avril, que les limitations aux importations instaurées par l’Algérie n’étaient « pas en conformité avec les accords de libre-échange » contenus dans l’accord d’association entre l’Union européenne (UE) et l’Algérie et qu’en cas d’échec du dialogue engagé entre les deux parties à ce sujet, « il faudra évoquer les clauses de règlement de différends  de cet accord. ».

Cela contredit , sur le plan des relations économiques les propos optimistes du ministre du commerce algérien lors de sa conférence datant du 02 mai 2018, commentant la venue  d’une  délégation européenne en ce mois de mai 2018 , je le cite «  L’UE est un partenaire stratégique. Nous avons expliqué la période difficile et nous avons invité nos partenaires à participer à cette transition et à cette diversification économique … Ils sont venus à Alger. .Ils ont exprimé leurs inquiétudes et ont compris la situation difficile que traverse le pays ».  Selon le gouvernement  algérien  sur la période 2005-2015, les exportations hors hydrocarbures de l’Algérie vers l’UE se sont établies à 14 milliards de dollars tandis que l’Algérie a importé pour 220 milliards de dollars de l’UE. En termes de recettes douanières, le gouvernement algérien estimait en 2015 le manque à gagner occasionné sur la même période, à plus de 700 milliards de DA soit plus de 6,7 milliards d’euros (au taux de 2015), soit 670 millions de dollars/an. Pour la partie européenne , il appartient à l’Algérie de comptabiliser ses exportations d’hydrocarbures vers l’Europe pour dresser la balance et pas seulement les produits hors hydrocarbures ayant une structure économique peu compétitives la structure du tissu économique, composée à 97% de très petites entreprises (TPE), est quant à elle peu orientée vers la performance économique en termes de production et d’exportation et donc d’aller vers les réformes en retard qui sont de la seule responsabilité du gouvernement algérien invoquant une législation bureaucratique en matière d’investissement et peu lisible pour les investisseurs étrangers, notamment européens, qui évoquent souvent pour les PMI-PME l’application de la règle 51/49% à tous les secteurs d’activité confondus, comme étant un obstacle à l’investissement. J’ai été destinataire , grâce à mes réseaux au niveau de la CEE à Bruxelles, fin décembre 2016 de la nouvelle monture de la révision partielle proposée par l’Union européenne suite aux propositions algériennes de l’Accord qui lie l’Algérie à l’Union européenne qui réconforte certaines propositions algériennes mais n’étant nullement question de modifier l’Accord cadre. Cela confirme la déclaration récente de responsables du Ministère des affaires étrangères pour qui le document contenant 21 recommandations permettrait de relancer la coopération entre l’Algérie et l’UE dans le but de mettre les relations économiques au centre de cette coopération, de donner à cet accord toute son importance et d’utiliser tout son énorme potentiel dans ses trois composantes: politique, économique et humaine. Comme rappelé dans mes contributions et reprenant certaines idées lors de ma conférence à l’invitation du parlement européen, après une réelle inquiétude de la communauté internationale où certains médias algériens ont supputé sur la rupture de l’Accord qui lie l’Algérie à l’Union européenne, les responsables algériens ont été clairs. L’Algérie qui a toujours respecté ses engagements internationaux, il n’est pas question de rompre l’Accord d’Association qui la lie à l’Europe, étant en négociation pour un partenariat gagnant/gagnant, l’Europe ne devant plus considérer l’Algérie uniquement du point de vue d’un marché. La situation du pays reste toutefois tributaire de l’évolution des marchés d’hydrocarbures, des ventes dont le pays tire l’essentiel de ses revenus, en rappelant que la coopération énergétique, basée sur un protocole spécifique, est au centre de la coopération avec l’UE. C’est à ce titre, que le Conseil des Ministres en date du 06 octobre 2015 a considéré nécessaire de réévaluer les volets économique et commercial de l’accord d’association avec l’Union européenne (UE) qui n’a pas réalisé les objectifs attendus en matière d’investissements européens en Algérie.

 3.- Pour un partenariat gagnant- gagnant

Entre 2014/2017 les principaux partenaires de l’Algérie, sont les pays de l’Union Européenne avec environ  50,67% des importations et 64,21% des exportations avec la dominance des  hydrocarbures. Lors de différentes  visites tant à Alger qu’à Bruxelles, les parties algériennes et européennes  ont  réaffirmé la détermination commune à rehausser les relations à la hauteur des ambitions proclamées.

L’Algérie est un acteur de stabilité de la région méditerranéenne et africaine et par exemple à travers les  canalisations Medgaz et Transmed un acteur stratégique pour l’approvisionnement en énergie de l’Europe ayant toujours respecté ses engagements commerciaux.

La volonté serait de « densifier » cette coopération, selon le ministre algérien des Affaires étrangères algérien, pour qui « la démarche d’évaluation réclamée par l’Algérie ne vise nullement à remettre en cause l’Accord, mais, bien au contraire, à l’utiliser pleinement dans le sens d’une interprétation positive de ses dispositions permettant un rééquilibrage des liens de coopération, Du côté européen, on évoque des discussions « constructives ».

Selon la partie européenne, la relation bilatérale, prometteuse aussi bien dans le domaine de l’énergie que dans l’activité des entreprises et du commerce, a un potentiel inexploré, même si grevé par des lourdeurs administratives et de décisions politiques persistantes.

C’est que la partie européenne doit regarder l’Algérie comme un partenaire et non comme un immense marché destiné à recevoir tous les produits «made in Europe». Comme l’Algérie doit comprendre qu’ en  ce XXIème siècle, les relations en réseaux ont remplacé les relations personnalisées entre chefs Etats ou ministres dans le domaine économique devant avoir des réseaux crédibles loin des slogans populistes qui n’ont aucune influence sur les décisions internationale et que l’Europe ne peut contraindre des entrepreneurs privés, mus par la seule logique de profit, qui ont de larges opportunités à travers le monde,  à investir dans un pays donnée, ce qui renvoie à la levée de contraintes du milieu des affaires. De ce fait l’Algérie sera ce que les algériens voudront qu’elle soit.  

L’Algérie afin de négocier en rapport de forces, implique un changement de la mentalité bureaucratique, en ce XXIème siècle ce ne sont pas les Etats qui investissent, jouant le rôle de régulateur, devant concilier efficacité économique et une profonde justice sociale, mais les opérateurs qui sont mus par la logique du profit. Personne ne pouvant se targuer d’être plus nationaliste qu’un autre, la facilité et la fuite en avant est de vouloir imputer les causes du blocage seulement à l’extérieur (ce discours anti-impérialiste chauviniste pour faire oublier les problèmes intérieurs, ce chat noir dans un tunnel sombre que l’on ne voit jamais) alors que le mal essentiel est en nous. L’extérieur est-il responsable de la montée en puissance de la bureaucratie destructrice et de la corruption dominante; l’extérieur est-il responsable de notre mauvaise gestion et du gaspillage de nos ressources. Certes, les inquiétudes étant légitimes car les baisses tarifaires sont un manque à gagner à court terme du fait du dégrèvement tarifaire, mais devant raisonner en termes d’avantages comparatifs dynamiques à moyen terme. Invoquer la situation mono exportatrice de l’Algérie, ne tient pas la route, la majorité des pays de l’OPEP étant membres de l’OMC (97% du commerce mondial et 85% de la population mondiale). Le grand défi pour l’Algérie est d’accélérer la réforme globale pour tirer les avantages comparatifs de l’insertion dans la division internationale du travail. Pour bénéficier des effets positifs de l’Accord avec l’Europe que d’une éventuelle adhésion à l’OMC, ( sinon les effets pervers l’emporteront) qu’il faille faire d’abord le ménage au sein de l’économie algérienne et que ce sont les freins à la réforme globale du fait de déplacements des segments de pouvoir (les gagnants de demain n’étant pas ceux d’aujourd’hui) qui explique le dépérissement du tissu productif. Toute analyse opérationnelle devra relier l’avancée ou le frein aux réformes en analysant les stratégies des différentes forces sociales en présence, la politique gouvernementale se trouvant ballottée entre deux forces sociales antagoniques, la logique rentière épaulé par les tenants de l’import (en réalité seulement 100 contrôlant plus de 80% du total) et de la sphère informelle malheureusement dominante et la logique entrepreneuriale minoritaire. Cela explique que l’Algérie est dans cette interminable transition, ni économie de marché concurrentielle à vocation sociale, ni économie administrée,  l’avancée des réformes étant inversement proportionnelle au cours du pétrole et du cours du dollar, les réformes  étant timidement faites avec incohérence lorsque  le cours baisse. Cela explique également que malgré des dévaluations successives du dinar, 5 dinars un dollar en 1974 à 115 dinars un dollar en avril 2018 au cours officiel e tà plus de 140 dinars un euro, il a été impossible de dynamiser les exportations hors hydrocarbures montrant que le blocage est d’ordre systémique. C’est que  80% directement et indirectement du taux de croissance du PIB (via le BTPH) et donc du taux d’emploi, est  tiré par la dépense publique via les hydrocarbures ce qui donne aux entreprises créatrices de richesses publiques ou privées (souvent endettées vis à des banques publiques) une part négligeable. Les infrastructures n’étant qu’un moyen, l’expérience récente malheureuse de l’Espagne qui a misé sur ce segment doit être méditée attentivement par les autorités algériennes. Aussi, pour pouvoir attirer les investissements porteurs, le gouvernement algérien devrait donc mettre en place des mécanismes de régulation afin d‘attirer des investisseurs porteurs, évitant des changements périodiques de cadres juridiques, des actions administratives bureaucratiques non transparentes source de démobilisation et qui risquent de faire fuir les investisseurs qu’ils soient locaux ou étrangers.  Sans chauvinisme, l’Algérie recèle des potentialités pour sortir de la crise.

En résumé,  il  s’agit comme je l’ai souligné il y a quelques années lors d ‘une conférence, à l’invitation du parlement européen à Bruxelles, de dépassionner les relations car la stabilité des deux rives de la Méditerranée,  nous impose d’entreprendre ensemble. Comme j’ai eu l’affirmer encore récemment  lors de l’interview à la radio publique arabophone la chaine une le premier mai 2018, dans plusieurs contributions nationales et internationales (voir site Mena Forum Bruxelles  09/05/2018) l’Algérie et l’Europe sont deux partenaires stratégiques. Cela a été réaffirmé par  le  ministre des Affaires étrangères  algérien lors d’une allocution prononcée à l’ouverture de la 11e session du Conseil d’association Algérie-UE le 14 mai 2018  à Bruxelles, seul porte parole officiel ,les affaires étrangères étant de la seule prérogatives du Président de la République ,  toutes les  autres récentes déclarations n’engageant que leur propre personnes et non le gouvernement algérien . je suis persuadé que grâce au dialogue productif les relations entre l’Algérie et l’Europe trouveront  une solution garantissant les intérêts réciproques, n’existant pas  dans la  pratique des affaires de sentiments. Nous devons tous ensemble  dépassionner les débats et  s’orienter vers un partenariat gagnant-gagnant.  Il s’agit comme je l’ai souligné il y a quelques années lors d ‘une conférence, à l’invitation du parlement européen à Bruxelles, de dépassionner les relations car la stabilité des deux rives de la Méditerranée,  nous impose d’entreprendre ensemble.  

Professeur des Universités, expert international Dr Abderrahmane MEBTOUL (ademmebtoul@gmail.com)

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