L’Algérie, acteur stratégique dans la stabilisation de la région méditerranéenne et sahélienne

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La stratégie de l’Algérie dans ses constantes diplomatiques et militaires est guidée par trois principes fondamentaux : non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats ; non intervention de l’armée algérienne hors du territoire ; prise en charge endogène de la sécurité régionale. L’expérience acquise sur le terrain par l’Algérie de la lutte contre le terrorisme suscite un intérêt croissant des chancelleries étrangères qui découvrent les dangers de ce phénomène transnational.  Il est reconnu le rôle stratégique de l’Algérie comme acteur majeur de stabilisation de la région et que toute déstabilisation aurait un impact négatif sur toute la région. Le tout sécuritaire a une limite  car il existe des relations dialectiques entre démocratie impliquant la population,  développement qui relève des prérogatives du gouvernement et sécurité, un non développement accroissant l’insécurité.

Professeur des universités, expert international Dr Abderrahmane MEBTOUL

1. Les relations entre les deux rives 

Les relations entre les deux rives du Sahara et les dynamiques de la conflictualité saharienne actuelle interpellent tant les pays de la région que l’Europe et les USA. Des stratégies d’adaptation sont nécessaires de l’Occident et particulièrement l’Europe en direction de leur Sud et sur les relations de toutes natures entre le Maghreb et l’Afrique. D’où l’importance d‘analyser les politiques africaines, maghrébines, les mutations de la géopolitique saharienne après l’effondrement du régime libyen, les conséquences pour la région des tensions au Mali, l’importance des échanges économiques (formels et informels) et des échanges humains de part et d’autre du Sahara, les flux migratoires notamment des migrants subsahariens qui s’installent désormais dans les pays du Maghreb. C’est pourquoi il y a lieu d’accorder une attention particulière aux tensions au niveau du Sahel où la ceinture sahélienne recouvre, entièrement ou en partie, les pays suivants : l’Algérie (à l’extrême sud), le Sénégal et la Mauritanie (au sud), le Mali et le Burkina Faso (au nord), le Niger et le Nigeria (à l’extrême nord), le Tchad (au centre).

Cet espace est soumis à des logiques géopolitiques divergentes, et doit inciter l’Occident d’avoir une autre vision de notre Sud en évitant une vision européo centriste. Il  y a lieu d’éviter des déclarations hâtives de verser dans la xénophobie qui alimente le discours des extrêmes, car l’Islam autant que toutes les grandes régions monothéistes le judaïsme, le christianisme sont des religions qui prêchent la paix et la tolérance. Ce qui se passe actuellement ne saurait en aucune manière refléter les idéaux de l’Islam. les organisations extrémistes fondamentalistes ne sauraient donc référer les idéaux de l’Islam profitant, d’une crise tant morale, mauvaise gouvernance au niveau de certains dirigeants locaux  accroissant  la misère dans les pays d’origine. Les responsabilités sont partagées. L’occident porte une responsabilité de cette situation. Ce qui ne disculpe pas certains régimes de l’Afrique fondés non pas sur des institutions démocratiques mais sur des relations tribales personnalisées.

2. L’origine de la situation présente 

Selon bon nombre d’experts du renseignement, l’origine de la situation présente dans la région provient du conflit au Moyen-Orient mais également de l’intervention occidentale en Libye et selon certaines informations récentes   Daech », se déplacerait récemment de la Syrie et de ‘l’Irak vers la région du Sahel. C’est pourquoi (voir la récente déclaration du G à Alger janvier 2018), la  plupart des dirigeants du Maghreb de l’Afrique,  l’Europe et des Etats-Unis d’Amérique s’accordent dorénavant sur la nécessité de coopérer davantage face à la menace de l’insécurité et du crime organisé, insistant sur une coopération étroite notamment dans le domaine du renseignement. Il est mis l’accent sur l’obligation de mettre en application une stratégie interrégionale qui associe l’ensemble des pays de la zone en plus des partenaires européens –américains du fait que la région est devenue un espace ouvert pour divers mouvements terroristes et autres groupes qui prospèrent via le trafic d’armes ou la drogue, menaçant la sécurité tant des espaces africains   que de la région euro-méditerranéenne. D’où l’urgence d’une coopération tant régionale que mondiale dans la lutte contre la criminalité transnationale nécessitant une amélioration des bases de données afin de lutter efficacement contre le crime transfrontalier et le terrorisme et d’un dialogue stratégique qui doit jouer un rôle essentiel afin de renforcer leurs relations futures dans les domaines politique, économique, culturel, scientifique et sécuritaire, notamment de lutter contre le terrorisme international et le crime organisé où nous  avons différentes formes de criminalité transnationale organisée  qui est une industrie en constante évolution, qui s’adapte aux marchés et crée de nouvelles formes de délinquance.  Il s’agit   d’un commerce illicite qui transcende les frontières culturelles, sociales, linguistiques et géographiques, et qui ne connaît ni limites, ni règles renforcé récemment par la cybercriminalité, liée à la révolution dans le domaine des systèmes d’infirmation qui peut déstabiliser tout un pays tant sur le plan militaire, sécuritaire qu’économique. Il englobe plusieurs domaines exploitant notamment de plus en plus l’Internet pour dérober des données privées, accéder à des comptes bancaires et obtenir frauduleusement parfois des données stratégiques pour le pays. Ainsi, sans compter la corruption à travers des surfacturations qui en Afrique entraine une hausse de prix des produits importés entre 10/20%  nous avons différents trafics illégaux, qui, selon les données internationales  2016/2017 se chiffre en plusieurs centaines de milliards de dollars, notamment les  trafics d’armes, les  trafics de drogue, la  traite des êtres humains  et l’immigration illégale,  le  trafic de ressources naturelles et le tout aboutissant souvent au   blanchiment d’argent dans   les  paradis fiscaux au   blanchiment d’argent.

Pour l’Algérie, existent des trafics de différentes marchandises subventionnées comme le lait, la farine le carburant achetées en devises fortes, où  selon les conclusions d’une  étude d’Atlantic Council sur la contrebande du carburant , citée par le journal britannique The Guardian, près de 660 000 véhicules marocains et tunisiens consomment du carburant algérien, soit près de 13% de l’ensemble du parc roulant dans ces deux pays.

3. Crime organisé : L’urgence d’une coopération régionale  

Il s’agit donc de lever les contraintes du fait que la corruptibilité générale des institutions, pèsent lourdement sur les systèmes chargés de l’application des lois et la justice pénale en général qui ont des difficultés à s’adapter aux nouveaux défis posés par la sophistication des réseaux du crime organisé. La collaboration inter-juridictionnelle est ralentie par l’hétérogénéité des systèmes juridiques notamment en Afrique du Nord et en Afrique noire. De plus, la porosité des frontières aussi bien que la coordination entre un grand nombre d’agences chargées de la sécurité aux frontières posent de grands problèmes. À terme, la stratégie vise à attirer graduellement les utilisateurs du système informel vers le réseau formel et ainsi isoler les éléments criminels pour mieux les cibler tout en diminuant les dommages collatéraux pour les utilisateurs légitimes. C’est que la résolution de ce mal implique de s’attaquer à l’essence (un co-développement) et plus de libertés  et non aux apparences si l’on veut éviter une crise majeure. Les élites des pays d’Afrique se sentent marginalisées, une jeunesse abandonnée  au désespoir  et  le   fossé entre les riches et les pauvres   de plus en plus grand, reflété par l’écart de revenus qui renforce les inégalités en matière de richesse, d’éducation, de santé. Des études récentes dans le domaine  politique, militaire  et économique   mettent  en garde contre les conséquences pernicieuses du chômage: « une génération qui commence sa carrière dans un désespoir étant une bombe sociale à retardement » Aussi, face au crime organisé transnational, l’Afripol constitue une base continentale de communication, de concertation, de coopération et de coordination. La police algérienne étant devenue une référence internationale, suite à la réunion consultative tenue le 12 décembre 2016 à Alger en présence de nombreux responsables de police africains, visant à permettre le partage d’expériences en matière de coopération. L’Algérie a abrité  la première Assemblée générale d’Afripol à Alger avec la participation de 48 pays et au cours de laquelle les représentants des pays africains ont défini les cadres généraux de coopération pour les institutions de police aux niveaux national, continental et international. Durant l’année 2017,  le directeur général de la Sûreté nationale de l’Algérie a été élu à la tête du mécanisme de l’Union africaine de coopération policière (AFRIPOL), comme nous avons assisté à la   désignation d’un responsable de la DGSN pour présider le groupe des experts d’Interpol de lutte contre la cybercriminalité.

L’Algérie acteur déterminant  de la stabilité de la région

Dans le cadre de la stabilisation de l’Algérie et de la région  il  faut rendre hommage  à l’ANP, aux forces de sécurité et à la diplomatie algérienne qui s’activent pour apaiser les tensions régionales, le terrorisme étant une menace planétaire. La sécurité de l’Algérie  est posée à ses frontières. La frontière Algérie Mali est de 1376 km, la frontière entre l’Algérie et la Libye  de 982 km, la  frontière Algérie Niger de  956 km, la frontière  Algérie Tunisie est de  965 km  à surveiller. Le problème est plus  grave pour  les  frontières conjointes avec le Mali et la Libye. Dans le contexte des crises libyenne et malienne, la sécurité aux frontières est devenue une préoccupation majeure des autorités algériennes. Cette question fait aussi l’objet d’un processus de construction et de sécurisation, à des fins internes et externes. Selon les experts militaires, la  stratégie algérienne se déploie sur trois niveaux : premièrement,  la mise en place d’un dispositif de sécurité aux frontières et la restructuration des forces armées et de sécurité ; deuxièmement, l’amorce de processus bilatéraux de coopération avec les pays voisins et enfin troisièmement, le développement d’un processus multilatéral à travers l’initiative des pays de Champ.  Cette stratégie est guidée par trois principes fondamentaux : non ingérence dans les affaires intérieures des Etats ; non intervention de l’armée algérienne hors du territoire ; prise en charge endogène de la sécurité régionale. Espérons donc pour le devenir de l’Algérie que cette même énergie soit déployée pour consolider le front social intérieur, afin d’éviter l’affrontement direct forces de sécurité –citoyens avec des couts colossaux. L’efficacité de la sécurité intérieure et extérieure doit impliquer les citoyens, supposant l’approfondissement de l’Etat de Droit de la démocratie tenant compte de notre anthropologie culturelle. Car, le succès final dépend d’une large coopération régionale et internationale et une nouvelle politique socio-économique adapté au nouveau monde. Car l’Algérie ne saurait à la fois supporter seul le fardeau financier avec la chute du cours du pétrole, devant à l’avenir mutualiser les dépenses grâce à une coopération régionale et surtout favoriser le développement et la démocratie tenant compte de son anthropologie culturelle, sans laquelle son audience sera limitée à terme.

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