Dix sept (17) questions pour déterminer le poids réel du Forum des Chefs d’entreprises (FCE) au sein de l’économie algérienne

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Le président du Forum des chefs d’entreprises, dans plusieurs placards publicitaires en date du 01 août 2017, ( et depuis plus d’annonce sur son site ) avait annoncé sans donner de détails de ses données statistiques qu’il représente 2000 chefs d’entreprises, qu’il emploie 300.000 travailleurs et qu’il réalise un chiffre d’affaires de 40 milliards de dollars et que très prochainement ses membres allaient exporter massivement vers l’Afrique. L’affaire dite du  « du boucher » qui était membre du FCE, pose la problématique suivante : ces 40 milliards de dollars si ces données sont vrais,  résultent-ils de la création de la valeur ajoutée interne ou d’actions spéculatives.

Contribution du Professeur Abderrahmane MEBTOUL Expert international

A- Place du secteur privé dans l’économie nationale

1. Le secteur privé algérien s’est développé depuis l’indépendance politique largement à l’ombre du secteur d’Etat selon le fameux slogan secteur privé facteur complémentaire du secteur d’Etat. Le milieu des affaires est peu propice aux initiatives créatrices de valeur ajouté à l’instar de la politique salariale qui favorise des emplois rentes au lieu du savoir et du travail. Cela explique que les entrepreneurs, face à une concurrence étrangère (nombreux privés dans l’import) à laquelle ils n’étaient pas préparée, ont des filières d’importation afin d’équilibrer leur comptes globaux. Que l’on visite bon nombre d’anciennes zones industrielles (Est- Centre – Ouest ou la zone de Ghardaïa) et l’on constatera que bon nombre d’anciennes usines se sont transformées en aire de stockage expliquant d’ailleurs le dépérissement du tissu productif où l’industrie représente en 2017 environ 6,3% du produit intérieur brut selon l’ONS. Et sur ces 6,3%, plus de 98/97% sont des entreprises familiales ou petites SARL peu initiées au management stratégique et à la concurrence internationale souvent endettées vis-à-vis des banques. La raison essentielle sont les contraintes d’environnement : bureaucratie pour  plus  de 50%, un système financier administré,( plus de 90% des crédits octroyés sont le fait de banques publiques), un système socio-éducatif inadapté et enfin l’épineux problème du foncier. A cela s’ajoute du fait de l’ancienne culturelle,  une méfiance vis-à-vis du privé tant local qu’international du fait que les tenants de la rente ont peu de perdre des parcelles de pouvoir. Cela explique d’ailleurs ces alliances entre la sphère bureaucratique et certaines sphères privées spéculatives mues par des gains de court terme via la rente. Or le véritable dynamisme de l’entreprise, qu’elle soit publique ou privée suppose une autonomie de décisions face aux contraintes tant internes qu’internationales évoluant au sein de la mondialisation caractérisée par l’incertitude, la turbulence et l’urgence de prendre des décisions au temps réel.

2.-Comme  ne pas rappeler le manque d’unification des organisations patronales  privées, ce qui pose un grand problème pour la présidence de la république et le  gouvernement  afin d ‘avoir des propositions cohérentes. Sans être exhaustif nous  avons la  Confédération générale des entreprises algériennes (CGEA)  la Confédération générale du patronat (CGP-BTPH), la Confédération des industriels et producteurs algériens (CIPA), la Confédération nationale du patronat algérien (CNPA, la Confédération algérienne du patronat (CAP) , le Conseil supérieur du patronat algérien (CSPA),  l’Association des femmes chefs d’entreprises (Savoir et vouloir entreprendre-SEVE), le Club des entrepreneurs et des industriels de la Mitidja (CEIMI). Quant au Forum des chefs d’entreprises (FCE), qui veut  s’ériger en syndicat,  il est   considéré comme un Think tank (laboratoire d’idées) et non comme une organisation syndicale. Pour éviter toute interprétation byzantine, de cette présente contribution, j’ai  toujours défend l’économie de marché concurrentielle à vocation  sociale, n’ayant jamais fait de différences entre secteur d’Etat performant et secteur privé productif,  qui a été inscrite dans la nouvelle constitution. Au moment fort du socialisme de la mamelle, j’ai dirigé le premier audit sur le secteur privé pour le compte du comité central du FLN entre 1979/1980. Puis , j’ai  été membre fondateur avec de nombreux amis  du secteur d’Etat qui recèle de nombreux amangers brillants et du secteur privé des 48 wilayas,  l’Association Algérienne  de Développement de l’Economie de Marché  ADEM , agrément national du ministère de l’intérieur  63/92 dont j’ai eu l’honneur d’été président de 1992 ( date ou certains préconisaient  l’économie de guerre)  à 2015.. J’ai toujours insisté sur le couple indissociable efficacité économique, répartition juste du revenu national par une  profonde justice sociale qui n’est pas l’antinomie de l’efficacité. Donc, je n’ai de leçons à recevoir de personne vis à vis de la défense du secteur privé créateur de richesses qui a besoin d’être développé et soutenu en symbiose avec le secteur d’Etat, en levant les contraintes du milieu des affaires loin des rentes :

Quel est le poids réel  du Forum des chefs d’entreprises FCE ?

Pour asseoir sa crédibilité, dont j’ai de nombreux amis au niveau de différentes organisations patronales dont le FCE, ce dernier doit répondre aux dix sept(17) questions suivantes afin d‘éclairer l’opinion publique pour mesurer  son influence réelle

1.- Quelle  est la nature juridique des  sociétés : SARL, sociétés par actions ou autres

 2.- Quelle est la part de l’emploi créé par rapport  à la population active d’environ 12 millions

3.- Quelle est la masse salariale octroyée et sa ventilation par qualification ?

4.- Etant à l’aube de la quatrième révolution économique, le capital argent n’étant qu’un moyen,  combien  de ses adhérents ont des laboratoires de recherche et quel est le montant du chiffre  d’affaires qu’ils consacrent  à la recherche ?

5.-Quelle est la structuration par secteur d’activité des 2000 entreprises entre 2016/2018 distinguant le chiffre d’affaires  relevant de la production locale, de la sphère commerciale interne et des activités  liées à l’importation ?

6.-Sa part dans le  chiffre global  rapporté respectivement au  pays secteur d’Etat et au secteur privé y compris le commerce services

7.– Sa part par rapport au chiffre d’affaires de Sonatrach

8– Sa part  de ce chiffre d’affaires par rapport au chiffre d’affaire de la sphère informelle  en dinars et en euros ou dollars

9– La part de l’investissement productif du FCE dans le total investissement public/privé entre 2006/2018

10– Quel est l’apport réel du FCE  dans la campagne des emprunts obligataires

Mais les indicateurs les plus pertinents sont :

11.- La création de valeur ajoutée du FCE et ses investissements sur fonds propres

12- Le profit net de toutes les entreprises du FCE , déduction des charges

13.- Le paiement des impôts à l’Etat des membres du FCE

14.- La participation du FCE  aux exportations hors hydrocarbures par produits

15.– Le montant des  crédits bancaires et le montant des  exonérations fiscales  reçus  par cette organisation et ses membres ont-ils remboursés les  banques

16.– Combien sur ces 2000 entreprises ont-elles une comptabilité analytique, pour cerner leurs couts  et combien sont-elles initiées au management stratégique et au pratiques du commerce international afin d’être concurrentielles ?

17-Combien ont couté toutes les rencontres nationales et internationales du FCE largement médiatisées en présence d bon nombre de membres du gouvernement,  et ont –elles eu un impact sur la valeur ajoutée de l’économie nationale et notamment des exportations de l’Algérie à travers ses membres notamment en Afrique ?

En résumé, je souhaite afin qu’elle  devienne une véritable force économique,productive, loin de la prédation,  une unification des organisations patronales, évitant cet émiettement.  Nous avons des données assez précises à ces questions mais voudrions  les confronter avec celles du FCE  et ce par un  large débat productif. Notre objectif, loin des querelles stériles, en ces moments de tensions budgétaires et de grands bouleversements géostratégiques dans la région,  est de privilégier les intérêts supérieurs de l’Algérie avant tout, sans distinguer le secteur d’Etat et el secteur privé, devant  contribuer  tous ensemble au développement national.

Pr Abderrahmane MEBTOUL fondateur et président de l’Association Algérienne de Développement de l’Economie de Marché ADEM 1992/2015- agrément national Ministère Intérieur 63/92- ancien président du Conseil national  de la privatisation (1996/1999)

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