Tamazight langue nationale et officielle: le défi est désormais académique

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La constitutionaalisation de la langue amazighe en tant que langue nationale et officielle place désormais l’Algérie face au défi académique pour la concrétisation de ce statut, ont soutenu des spécialistes, à la veille de la célébration de la date-anniversaire du Printemps amazigh, le 20 avril 1980.

Le professeur des sciences du langage et de tautologie et directeur du Centre national pédagogique et linguistique de l’enseignement de Tamazight (CNPLET), Dourari Abderezak, a souligné que cette avancée « nous met aujourd’hui devant des défis qui se posent (….) aux chercheurs, appelés à prendre entièrement leurs responsabilités pour faire un travail dans le cadre de +théories scientifiques et méthodes qualitatives+ pour son enseignement ».

Selon M. Dourari, il est nécessaire de faire un travail de « normalisation » de la langue qui lui permettra « d’intégrer les différentes institutions de l’Etat et de la société ». Ce travail de recherche, a-t-il soutenu, se fera évidemment autour de la future Académie de langue amazighe qui, a-t-il souhaité, sera adossée à une loi qui donnera à cette institution la latitude de faire « réellement de la recherche scientifique et de fonctionner comme référence dans le domaine ».

L’un des défis les plus importants qui se posent actuellement à la communauté scientifique est d’éviter de tomber dans le « piège » de la standardisation des différentes variétés (Kabyle, Chaoui, Mozabite, Zénète) de Tamazight pour créer une « langue unifiée qui ne serra comprise ni parlée par personne », a mis en garde ce même chercheur.

« L’Algérie compte deux langues maternelles qui sont ‘l’arabe algérien’ et tamazight (avec ses différentes variétés), et il n’est pas normal qu’une langue puisse empiéter sur l’autre, ou de créer une langue artificielle qui sera imposée puisque chaque région de notre pays a sa variété particulière qui est sa langue maternelle et à laquelle elle est attachée », a indiqué Pr Dourari pour qui « il ne faut donc pas bousculer les situations ‘géolectales’ et géoculturelles ».

Une langue s’écrit avec ses propres caractères

Abordant la question de la graphie à adopter pour la transcription de Tamazight, le chercheur au Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques (CNRRPAH), Yacine Sidi Salah, a indiqué à l’APS qu’ »une langue s’écrit avec ses propres caractères ».

Ce chercheur qui étudie les transcriptions libyques sur les stèles et autres site naturels, s’est interrogé pourquoi ce problème de transcription ne s’est pas posé pour les autres langues enseignées en Algérie. Selon lui, « l’enseignement de Tamazight doit se faire en Tifinagh et libre ensuite aux chercheurs d’utiliser la graphie qui leur convient (latine ou arabe) ».

Abordant les recherches sur les inscriptions libyques, M. Sidi Salah a regretté le « peu d’intérêt » des linguistes aux inscriptions rupestres les considérant comme une représentation préhistorique qui relève de la discipline de la préhistoire. Ces travaux sur le libyque peuvent être utiles si on arrive à les réunir dans des centres de recherches et laboratoires spécialisés en linguistique amazighe qui restent à créer et qui auront à encadrer et à former des équipes de recherche pluridisciplinaires (linguistes, socio linguiste, archéologues, historiens des épigraphistes). La création de ces laboratoires apportera un « plus » pour l’Académie de langue amazighe, a-t-il soutenu.

Rendant un hommage souligné à un des précurseurs de la langue amazighe, Mouloud Mammeri, M. Dourari a observé que ce romancier et anthropologue a fait une œuvre « militante » pour attirer l’attention sur le fait que « la berbérité est le socle sur lequel est battit l’Algérianité ». Il a estimé que l’oeuvre anthropologique et littéraire de Mammeri est à « saluer de manière très particulière », mais son œuvre linguistique, par contre, pose problème du fait que lui-même n’était pas linguiste et concédait qu’il a fait une œuvre de pionnier et que c’est aux autres spécialistes d’améliorer son travail.

1990, début du processus de reconnaissance officielle de Tamazight

C’est à partir des années 1990 que le processus de reconnaissance officielle de Tamazight, langue, culture et identité, a été marqué ses premiers balbutiements, d’abord avec l’ouverture des départements de langue et culture Amazighes à l’université de Tizi-Ouzou en 1990 puis à  Bejaïa, en 1992, qui formaient en poste-graduation, permettant à la recherche de se développer, à proposer des thèses et des mémoires sur la langue, la culture et la société, produisant une grande documentation en matière de recherche.

Durant cette phase de reconnaissance officielle, M. Dourari rappelle la période « qualitative » qui a débuté dans les années 2000 avec la constitutionnalisation en 2002 de Tamazight langue nationale pour devenir officielle dans la constitution amendée de février 2016.

« Ces deux phases sont déterminantes parce que Tamazight est définitivement rentrée par la grande porte dans la culture algérienne, et l’Etat, après l’officialisation de Tamazight et l’intégration de Yennayer, jour du nouvel an amazigh, dans le calendrier des fêtes nationales chômées et payées, s’est réconcilié avec son identité maghrébine-amazighe », a-t-il conclu.

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