Sondages et consultation en ligne : Souriez, vous êtes bernés !

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Les faits sont là : les consultations publiques par Internet prêtent le flanc à ce jour à toutes les formes de manipulations !

Sondages, consultation en ligne ! Une avancée pseudodémocratique ?

Les «sondages d’opinion en ligne», ou appelez cela comme vous voulez, tout comme les consultations en ligne à caractère plus « administratif » des populations sont des consultations qui peuvent interpeller le citoyen sur divers sujets, notamment des projets de sociétés qui seront suivis de projets de loi, puis éventuellement de loi… Ce sont, sur le papier virtuel, de très belles idées ! De belles idées qui aimeraient bien passer pour de très grandes avancées de cette fameuse démocratie participative après laquelle nous courrons depuis… cinquante ans.

La démocratie participative est en effet un concept apparu à la fin des années 1960, depuis les politiques en pommadent le citoyen (pour lui montrer tout l’intérêt qu’il porte à son avis), et avec d’autant plus d’entrain, que c’est un concept qu’internet pourrait (a priori) enfin servir concrètement, et permettre de passer (enfin) de la théorie à la pratique.

Du calme, avant de rendre ce concept efficient, il y a encore beaucoup de chemin à faire et quelques biais flagrants qu’il est peut-être bon de rappeler à certains parangons de vertu.

Eviter l’interactivité factice

Il ne s’agirait pas que cette interactivité accrue avec le citoyen ne soit factice, qu’elle se mette, par exemple (par l’intermédiaire de certains médias) au service d’un populisme qui gagne du terrain en Europe, il ne faudrait pas non plus qu’elle soit utilisée par les politiques comme un outil de manipulation d’opinion publique… N’est-ce pas ?

Pour ce qui concerne les avis du citoyen en ligne, cette mise en garde vaut pour tous les types d’émetteurs de « sondages » ou de consultations en ligne. Cela vaut pour les médias, les politiques, les élus, et les citoyens que nous sommes : j’inclus de fait également dans ce propos celui ou celle, moi, vous, votre voisin, votre voisine qui pouvons lancer par exemple des pétitions en ligne.

Information en continu et « sondages d’opinion » : êtes-vous pour ou contre les pigeons en ville ?

Les « sondages d’opinion » instantanés se sont particulièrement développés avec le développement de l’information en continu. Pour une émission d’actualité quelle qu’elle soit, c’est incontestablement un moyen fort d’impliquer et de fidéliser le téléspectateur, ce qui est tout à fait légitime, mais, il ne faut pas déraison cultiver !  Certaines interpellations des téléspectateurs me laissent parfois pantois.

Vous brûlez d’envie j’en suis certain de savoir si le gouvernement qui a renoncé au projet d’aéroport à Notre Dame des Landes  a consacré la victoire de, je cite in extenso : « des écolos et des punks à chiens » ! Ne vous morfondez pas dans l’ignorance ! Vous pouvez prendre connaissance des résultats par là ! Que dire quant à la formulation caricaturale du questionnement ? Que penser de la valeur de ce type de « sondage » ?

Les médias coutumiers de cette forme de « sondage d’opinion » via leurs sites web et en soutien de leurs émissions, devraient veiller à ne pas mélanger les genres. De ne jamais faire confondre (par omission ou intentionnellement) l’opinion, de téléspectateurs de leur propre chaîne et/ou disposant d’internet, d’avec l’opinion de la population française !

La grenouille et le bœuf

Ces « sondages », effectués sans la moindre rigueur,  sont au mieux l’expression de l’humeur d’anonymes. Ils ne sont naturellement en aucun cas représentatifs de l’opinion française. Ils ne peuvent donc être présentés ou suggérés comme tels lorsqu’ils sont évoqués à l’antenne ! Quand bien même la grenouille se voudrait parfois aussi grosse que le bœuf : elle demeure une grenouille.

 Une Grenouille vit un Bœuf
Qui lui sembla de belle taille.
Elle qui n’était pas grosse en tout comme un œuf,
Envieuse s’étend, et s’enfle, et se travaille
Pour égaler l’animal en grosseur,
……………Disant : Regardez bien, ma sœur ;
Est-ce assez ? dites-moi ; n’y suis-je point encore ?
Nenni. M’y voici donc ? Point du tout. M’y voilà ?
Vous n’en approchez point. La chétive Pécore
S’enfla si bien qu’elle creva.
Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages :
Tout bourgeois veut bâtir comme les grands seigneurs,
Tout petit prince a des ambassadeurs,
Tout marquis veut avoir des pages.

La Fontaine

Le danger qui rôde  avec ce genre de questionnements à chaud est à mon sens que sous couvert d’être brut de décoffrage et décomplexé, ils peuvent rapidement déraper. La bêtise humaine on sait à peu près où elle commence, mais pour de l’audimat, personnellement je ne sais pas encore ou elle s’arrête. Ils pourraient (sur une population restreinte et non représentative ) devenir de véritables engrais à populisme !

Du bistrot à l’assemblée

En France, nous Français, sommes sympathiques et avons un avis sur tout, mais sur tout également. C’est ce qui fait notre charme, c’est plus ou moins joyeux selon les sujets. Pour autant nos conversations de bistrot ont-elles vocation à devenir des débats nationaux ?

Si tel est le cas, et pour caricaturer, des téléspectateurs seront-ils sollicités un jour par une chaîne pour savoir s’ils sont « Pour ou contre le tri des migrants ? ». Pour ma part je trie les déchets, si on m’en explique la raison, mais le tri des hommes, je passe mon tour !

Qu’une telle question douteuse soit posée à un public restreint vous paraît-il vraiment inconcevable ? Qu’adviendrait-il alors de l’usage fait des résultats ? Comment seraient-ils exploités ? Les Français sont pour le tri des migrants ? Contre le tri des migrants ? En arriverons-nous bientôt là…  aussi loin de Ma France de Jean Ferrat ?

NDLA : Pour ce qui concerne les pigeons, je vais réfléchir encore un peu avant de me prononcer.

Consultation en ligne de la population : et moi et moi ? Émoi !

Pour ce qui concerne les consultations de la population française par des organismes d’État (ou mandatés par l’État) sur des sujets impliquant à court moyen et long terme la vie des citoyens… rappelons-nous de deux choses :

1.      Selon le baromètre 2017 du numérique produit par l’Arcep le Conseil général de l’économie et l’Agence du numérique indique que « 15% des Français ne sont pas connectés Internet, 6% n’ont pas de mobile » ! Les consultations publiques via Internet ne sont donc pas la consultation des Français, mais la consultation de Français ayant un accès à Internet.

2.      Pour ce qui est de l’avenir des consultations publiques (une fois intégré le point 1 qui marginalise encore une partie de la population). Gardons en mémoire la façon dont la consultation publique sur « la neutralité du Net » a été menée aux États-Unis. Elle a connue un très grand succès dont les organisateurs pouvaient être fiers : pas moins de 21 millions de participants !

La conclusion de l’enquête initiée avant le vote par le procureur de l’État de New York qui soupçonnait des irrégularités est sans appel, la consultation publique a totalement été biaisée par des centaines de milliers de faux commentaires. Plus de la moitié des « participants » étaient des fake ou des bots générant des  fake reviews  ! Avoir vu juste est tout à son honneur ! Le vote, lui, n’aura pas attendu ses conclusions : Le jeudi 14 décembre 2017, La Commission fédérale des communications (FCC), le régulateur américain des télécoms, votait la fin de la neutralité du net aux états unis   par trois voix contre 2.

L’anagramme de « démocratie participative » est-il voué à être « mascarade » ?

Les faits sont là : les consultations publiques par  Internet prêtent le flanc à ce jour à toutes les formes de manipulations !

Si 15 % des Français n’ont pas accès à Internet, prenons en acte. Notons que les gouvernements qui se sont succédé œuvrent à ce titre pour infléchir ce pourcentage : en assistant les foyers les plus démunis d’une part et en aidant  financièrement (à hauteur de 150 euros maximum) les foyers les plus isolés pour l’achat d’une parabole, d’une antenne ou d’une box.

En attendant les effets de ces mesures, pour que les consultations publiques en ligne du citoyen aient du sens et puissent soutenir cette démocratie participative tant vantée. Ne serait-il pas au minimum souhaitable (dès lors que le niveau de la consultation en ligne engage notre avenir commun), que ces dernières ne soient pas diligentées par le(s) commanditaire(s) : État, Collectivités…. mais par des organismes indépendants qui soient en mesure, de garantir la représentativité de la consultation ?

Si Internet peut servir une véritable démocratie participative,  empêcher le type supercherie honteuse qui a été orchestrée aux États-Unis n’est pas une option ! À moins de vouloir faire cyniquement d’Internet le complice d’une démocratie participative factice !

À bon entendeur, le Net et sa neutralité vous saluent.

P.-S. Si j’écris des vérités que certains n’ont aucune envie de lire, ils n’ont qu’à fermer leurs yeux.

 

Source: contrepoints

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