Partenariat public-Privé : la décision du président est constitutionnelle

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1. Je me félicite de la décision du président de la république  d’avoir recadré  les décisions relatives à la charte partenariat public-privé et notamment l’ouverture du capital des entreprises publiques, document inachevé, qui mérite une reformulation  plus précise dans beaucoup de domaines devant éviter  le danger du passage d’un monopole public à un monopole privé rentier beaucoup plus néfaste. L’objectif stratégique n’est pas  de servir une clientèle mais de favoriser  un système concurrentiel, selon le couple,  l’efficience économique  et la nécessaire  cohésion sociale. Aussi il ne s’agit pas d’enlever les prérogatives au premier ministre (coordinateur), qui n’est pas un chef de gouvernement, étant dans un régime semi-présidentiel,  mais de se conformer aux règles institutionnelles. Connaissant parfaitement ce dossier sensible , afin d’éviter toute confusion, selon la loi  en vigueur , ce processus étant éminemment politique, toute ouverture totale ou partielle du capital  relève en dernier ressort du conseil des ministres, présidé par le président de la république  et non du conseil des participations de l’Etat  qui n’est qu’un organe  de propositions  et d’exécution à travers ses différents organes, ministères ou une agence de participation/privatisation  autonome. Il s ‘agit d’éviter la précipitation, l’Algérie ayant besoin en cette conjoncture de sérénité et de stabilité sociale,  d’avoir une vision  stratégique du couple démonopolisation/ privatisation, ne devant pas  les  confondre privatisation et démonopolisation complémentaire, tous deux,  allant vers le  désengagement de l’Etat de la sphère économique afin qu’il se consacre à son rôle de régulateur. stratégique en économie de marché. La privatisation partielle (ouverture du capital) ou totale à travers différentes techniques,  cession à travers la bourse- avis d’appel d’offre, participation des cadres et salariés, bons à l’ensemble de la société ,   est un transfert de propriété d’unités existantes  vers le secteur privé et la démonopolisation consiste à favoriser  l’investissement privé dans de nouveaux projets

2. Pour éviter de mauvaises interprétations, au moment où je présidai le conseil national des privatisations entre 1996/1999, et n’ayant plus le droit de réserve, je tiens en toute objectivité à  apporter les précisions suivantes.  A cette époque, il y avait un chef de gouvernent et non un premier ministre,  qui était Mr Ahmed Ouyahia  qui selon les textes  de l’époque avait plein pouvoir de privatiser ou pas. A été  procédé à  la liquidation des entreprises par le conseil des participations de l’Etat présidé par le chef de gouvernement  et non le Conseil, notamment locales déficitaires. et se pose cette question: à qui ont été vendus ces milliers  de mètres carrés   localisés dans des zones urbaines? Là aussi,   la vente partielle de certains actifs des des grandes entreprises, cela ne relevait pas du conseil mais directement du Chef du gouvernement. Le Conseil de Privatisation n’avait aucun pouvoir réel étant un organe technique qui dépendant des décisions du gouvernement. Le gouvernement de l’époque  a laissé ce conseil en léthargie pendant près deux années 1996/ mi 1997 où d’ailleurs j’ai profité, à cette époque du terrorisme , n’ayant pas de travail,  pour diriger un audit à la demande des autorités du pays , sur l’optimalisation des moyens financiers  de la DGSN au cabinet . J’ai donné plusieurs conférences de presse publiques  dont El Watan les a relatés pour dénoncer le blocage en menaçant de démissionner. C’est seulement le second  trimestre  1997 le gouvernent a livré quelques PMI-PME dont certains hôtels  pour en faire l’évaluation ,  les grandes entreprises relevant exclusivement  du chef du gouvernement, Durant l’année 2017, l’on a inventorié, selon plusieurs techniques, et en faisant appel uniquement au bureaux d’études algériens ,  les unités retenues par le gouvernement pour la privatisation totale . Suite à un conseil de gouvernement, le Conseil a été autorisé à lancer un avis d’appel d’offre pour quelques petites unités. Ce qui a été faite dans la totale transparence, en présence des repreneurs potentiels, de la télévision et de la presse nationale.. En septembre 1998, coïncidant avec la démission du président  Liamine   Zeroual, une décision politique est  tombée : arret de cette procédure puis  dissolution du conseil des privatisations qui n’a privatisé aucune unité et donc aucun délit d’initiés et j’ai rejoint l’Université d’Oran. Donc nous n’avons aucune responsabilité ni dans le bradage, ni dans l’arrêt du processus qui est un acte éminemment politique, puisque n’ayant rien privatisé sur ordre.

3. Quelles leçons tirer  de notre  expérience  sur le terrain  en tant que président du conseil des privatisations ?  D’abord, ,  évitons toute utopie, tout privé qu’il soit algérien américain européen ou autre est guidé par la seule logique du profit n’existant pas  de sentiments dans la pratique des affaires  C’est la demande c’est à dire le marché qui est l’élément déterminant (taux directeur du profit, existant un marché mondial de privatisation) et non l’offre. On ne privatise que  les unités  rentables et non les unités déficitaires,( sauf si on est attiré par l’assiette de terrain à des buts spéculatifs).Dans ce cas , il est préférable de faire jouer la démonopolisation. C’est donc le taux de profit  sectoriel mondial  qui est indicateur de référence  et dans la plupart des pays qui ont engagé l’ouverture totale ou partielle du capital,  il y a eu décote d’environ 20 % par rapport à la valeur déterminée, (en comparaison à des projets neufs) pour attirer les investisseurs nationaux, internationaux. A la lumière  de mon expérience je tire quatre leçons. Premièrement  l’expérience menée sur le terrain a montré  des comptabilités défectueuses, la majorité  des unités évaluées n’ayant pas  de comptabilité analytique afin de cerner les couts,  existant un écart entre le  réel et le bilan, certains repreneurs étant intéressés surtout par le terrain pour des raisons de spéculations foncières et non par l’unité. Concernant  la gestion, ayant eu à diriger pour le compte du Ministère de l’Energie assisté des cadres dirigeants de  Sonatrach un audit regroupant l’amont, l’aval, les canalisations et la commercialisation, pour cette grande société stratégique,  il nous a été difficile d’établir des comptes de surplus  physico-financiers pour rester de la rentabilité : alors qu’en est-il des autres entreprises publiques ? Sonatrach a besoin comme l’a souligné récemment le PDG un nouveau management stratégique. Deuxièmement,  les délais entre  le moment de sélection de l’entreprise à ouvrir le capital, les évaluations, les avis d’appel d’offres, le transfert  au Conseil des Participations de l’Etat sous la présidence du premier ministre, puis au Conseil des Ministres  et la délivrance du titre final de propriété  doivent être  clairement  datés, afin de ne pas  décourager tout repreneur. Car, en ce monde les capitaux  mobiles vont s’investir là où les obstacles économiques et politiques sont mineurs, le temps étant de l’argent. Or seule une synchronisation clairement définie permettra   d’éviter les longs circuits bureaucratiques. Troisièmement, les répartitions de compétences devront être précisées pour savoir  qui a le pouvoir : de demander l’engagement d’une opération de l’ouverture du capital ; de  préparer la transaction ; d’organiser la sélection de l’acquéreur ; d’autoriser la conclusion de l’opération ; de  signer les accords pertinents et de  mettre en œuvre les accords et s’assurer de leur bonne exécution. Quatrièmement,   il  faut être attentif  tant à la méthode que la  technique   de privatisation qui ne sont pas neutres mais traduisent des rapports de forces au niveau de la société,  soit la volonté d’accélérer le  processus soit d’opter pour le gradualisme. Le processus de privatisation comprend plusieurs phases contenues dans un programme subdivisé en plusieurs étapes dont certains constituent un passage douloureux mais déterminant pour l’entreprise. La méthode usuelle consiste à établir d’abord un diagnostic aussi complet que possible comprenant: la situation de l’outil de production, la qualité des produits,  la position commerciale,  l’analyse de la compétitive avec des normes internationales, le diagnostic financier, le diagnostic fiscal, l’étude de l’ environnement local, national et international, l’évaluation du management et la qualification du personnel A l’issue dû diagnostic l’on peut élaborer un scénario de privatisation, accompagné de plusieurs alternatives tenant compte de la politique économique du gouvernement, des contraintes qui s’imposent tant au pays qu’a l’entreprise ainsi que des propositions de choix stratégiques à moyen et long terme. Ces propositions concernent en général: le plan budgétaire,  le plan industriel, le plan financier,  le plan commercial, le plan d’emploi,  et la mise en œuvre du calendrier.

4. En résumé,  la  démonopolisation/privatisation est un  processus  éminemment politique. Il déplace en fonction des rapports de force des acteurs, des segments  de pouvoir. Les gagnants d’ aujourd’hui ne sont pas forcément ceux de demain, implique une vision stratégique des réformes structurelles à mener, des stratégies d’adaptation du devenir de l’Algérie  horizon  2020/2030 face aux nouvelles mutations géostratégiques mondiales, étant à l’aube de la quatrième révolution économique mondiale, de la transparence dans les décisions renvoyant à la bonne gouvernance   et     l’adhésion   de toutes les forces politiques économiques et sociales, grâce  à un  dialogue productif. Pour terminer, évitons les mauvaises interprétations et des procès d’intention et privilégions uniquement les intérêts supérieurs de l’Algérie. La décision de son Excellence Mr le  Président de la république concernant l’ouverture du capital,  rentre dans le cadre de ses prérogatives constitutionnelles.

Professeur des universités, expert international Dr Abderrahmane MEBTOUL

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